Yves Armand
Une maison d’éducation chrétienne à Grenoble : l’externat Notre-Dame (1870-1965)

Paris – l’Harmattan – 2012 – 326 p.

En tant que telle, l’histoire d’un collège catholique de province n’appellerait pas une recension. Si, néanmoins, l’Externat Notre-Dame de Grenoble, fondé en 1870, en est ici l’objet, c’est parce que, outre son évident intérêt local, il est de type emblématique, représentatif d’un type d’établissement d’éducation chrétienne que l’on trouve dans toutes les villes d’une certaine importance, spécialement les villes épiscopales.

A la différence du Petit Séminaire, plus explicitement ordonné à la formation au sacerdoce, plus proche des collèges congréganistes, dont il est néanmoins, si fraternellement que ce soit, objectivement concurrent, le collège secondaire, créé à l’initiative de l’ Évêque et confié aux prêtres diocésains[1] -internat ou externat, selon les cas-  reçoit des élèves de milieu plutôt aisé, certes susceptibles d’entrer dans le clergé séculier mais plutôt destinés à constituer, ou à reconstituer, une élite chrétienne susceptible de résister à l’offensive rationaliste, voltairienne, franc-maçonne ou laïciste qui se déploie au XIXème siècle, et de participer ainsi à un urgent renouveau religieux. Et tel est bien le cas -et l’objectif- de l’établissement grenoblois, face aux courants anticléricaux de notables et politiciens locaux.

Ecrit par un ancien élève de la promotion 1955 avec l’aide et les témoignages de plusieurs de ses condisciples, ce volume ne se prétend pas « scientifique ». Mais il ne cède pas non plus à la dérive sentimentale de l’idéalisation du passé ou à la folklorisation anecdotique des souvenirs. Il rend compte des difficultés -notamment d’ordre logistique et financier- qui affectent inéluctablement la vie de ces maisons, incessamment contraintes de se défendre contre un environnement politique plus ou moins hostile et des obstacles auxquels elles font courageusement face. A cet égard, il en offre un excellent exemple.

Sans doute aurait-on souhaité une étude approfondie de l’origine socio-culturelle des élèves, comme de leur carrière adulte, ainsi que le rappel de certaines figures d’ « Anciens »   devenus illustres, ou au contraire remarqués pour un anticléricalisme ou une inconduite qui confirment que l’entreprise éducative est aléatoire… Du moins est-il légitime, car leur réputation a dépassé les frontières du Dauphiné, d’évoquer la mémoire du Chanoine Anglès d’Auriac, qui en fut un Supérieur inoublié, ou celle de l’Abbé Xavier la Bonnardière, professeur justement admiré de philosophie ; tous deux anciens élèves de l’Externat, ils y passèrent, en quelque manière, toute leur vie. Et l’on citera aussi un autre «Ancien », Monseigneur Guerry, archevêque de Cambrai.

Ce type d’établissement s’est transformé et, désormais, vit autrement. C’est précisément pourquoi il convient de ne pas méconnaître et de ne pas oublier ce moment et cette modalité de la pédagogie chrétienne.

Guy AVANZINI



[1] cf. Michel Launay – notice Prêtres Diocésains professeurs – pp 607-609 – in G. Avanzini, A.M. Audic, R.Cailleau et P. Penisson. Dictionnaire historique d’éducation chrétienne d’expression française – Editions Don Bosco et AIRPC – 2009 – 854 p.