Jacques Maritain
Pour une philosophie de l’éducation

Paris – Ed Parole et silence – 2012 – 222p.

Pourquoi une troisième réédition ? Ce livre, paru pour la première fois en France en 1959, peut-il encore intéresser ? Aussi bien, Maritain n’est pas un spécialiste de l’éducation. Cependant, si son ouvrage s’est durablement et profondément inscrit dans le débat pédagogique, c’est sans doute parce que, à partir des événements contemporains, il porte sur l’essentiel : il part de l’idée que l’éducation est inséparable de principes, d’idéaux, de valeurs. Il travaille donc à un renouveau de la philosophie de l’éducation, et cela à un moment où l’essor des sciences de l’éducation tendait plutôt à en détourner. Pour lui, la crise en cours tient au défaut de finalités. Il importe donc de rappeler qu’elles sont prioritaires. Non qu’il néglige les sciences, spécialement la psychologie, mais il faut les resituer à leur vraie place, celle de la connaissance des sujets et des contextes. Fidèle à l’inspiration de St Thomas et à la tradition de la pédagogie dominicaine, il discerne chez l’enfant un élan, un désir d’apprendre, le souhait d’appréhender la vérité. C’est à ce mouvement spontané que les finalités de l’éducation doivent répondre.

Sans doute est-ce parce que son propos traite de l’essentiel, le permanent, qu’il est aussi éminemment actuel. Il vaut pour le présent comme pour tout temps. C’est pourquoi il s’applique à la situation de l’Ecole après 1968. En particulier, il propose avec force de passer de la pluralité des référentiels philosophiques et religieux de notre société à un pluralisme qui, prenant appui sur une « charte démocratique », permettrait le respect de la diversité des courants de pensée.

C’est la raison pour laquelle, malgré les apparences, le christianisme lui paraît une force de proposition pour susciter et rénover l’éducation. Au moment où l’Ecole subit une certaine perte de confiance qui la démoralise, il est, pour Maritain, susceptible d’énoncer une signification de la vie et de la destinée. A cet égard, ce livre participe efficacement à un renouveau de la pédagogie chrétienne, ce qui est bien la fonction de cette revue.

Dans une éclairante préface, Guy Avanzini s’interroge sur les raisons du succès des précédentes éditions. C’est, pense-t-il, parce que, dans un contexte de trouble et de déconvenue, Maritain répond exactement au problème qui les provoque, fournit des pistes et ouvre des perspectives, précisément celles du christianisme. C’est la permanence de cette pertinence qui justifie de se réjouir de cette 3ème édition, à laquelle on souhaite un plein succès.

Alain Mougniotte