Maria Montessori
Dieu et l’enfant, et autres écrits inédits

Parole et Silence – 2015 – 250 p.

La pensée religieuse de Maria Montessori demeure mal connue, malgré la place majeure qu’elle occupe dans son oeuvre. Freinée dans son expression par le souci de ses relations avec le Saint-Siège, surtout après la publication, en décembre 1929, de l’Encyclique Divini Illius Magistri, elle doit aussi se défendre de la pression du fascisme. Et, en France, vu le laïcisme ambiant, son influence sur la pédagogie de l’Ecole Maternelle s’accompagne de l’occultation de sa dimension chrétienne, au point que celle-ci est ignorée même dans certains établissements officiellement Montessoriens, au mépris de son rôle, direct ou indirect, dans le mouvement du renouveau catéchétique. C’est dire l’intérêt que présente la parution, enfin, en français, de l’étude sur « Dieu et l’enfant », accompagnée de quelques fragments, sans doute écrits en 1939, en vue d’un livre qui ne fut jamais achevé ni publié. Aussi bien, la complexité et l’obscurité de ce contexte donnent à la présentation de Fulvio de Giorgi un caractère un peu embarrassé.

Quoi qu’il en soit, ce texte bref -environ 45 pages- met bien en évidence l’originalité et la force de la conception montessorienne de l’éducation religieuse : celle-ci ne consiste pas à tenter d’inventer une « méthode active » de l’enseignement de la doctrine mais, beaucoup plus fondamentalement, à introduire à une expérience du vécu liturgique. En outre, ce document lui offre l’occasion de formuler l’essentiel de ses vues sur l’éducation de l’enfant et de la considération due à sa nature, à ses besoins, à son dynamisme endogène. Respecter l’enfant, c’est une façon de respecter Dieu. Que de parents et d’éducateurs auraient bénéficié à méditer ces pages !

Le regret porte seulement sur leur brièveté, car on aimerait les voir approfondies et précisées. On ne s’étonnera pas de leur insistance un peu réitérée sur la thématique du pêché originel, évidemment due au désir de ne pas s’exposer à l’objection des théologiens qui reprochaient volontiers à l’Education Nouvelle de négliger la tendance pécheresse de l’être humain et de céder à l’angélisme. En revanche, on souhaiterait une approche plus soutenue du concept de nature ; Et, s’il est légitime d’insister sur la différence psychologique entre l’enfant et l’adulte, encore faut-il saisir comment celui-là devient celui-ci, autrement dit rendre compte de la genèse. Enfin « le droit de l’enfant à une éducation saine » (p.64)et la satisfaction de ses « vrais besoins » (id)appellent une critériologie faute de laquelle l’éducateur risque le désarroi ou la négligence. Il reste que cette publication aidera à élaborer une vraie synthèse de la pédagogie montessorienne, dont les convictions unifiantes appellent une identification plus systématique.

Guy Avanzini