Max Bobichon, un prêtre dans la cité

Editions Libel – Lyon – 2017 – 160 p.

Issu d’entretiens avec le Professeur Jean-Dominique Durand et Thomas Montmessin, ce livre ne traite pas, au premier regard, de pédagogie chrétienne, ni même de pédagogie. Mais en réalité, c’est bien d’éducation qu’il s’agit. Il est en effet dû à un prêtre du Diocèse de Lyon qui, à l’occasion du 60ème anniversaire de son ordination sacerdotale, a souhaité analyser les étapes successives de sa vie et les ministères qui lui furent confiés. Or, parmi ceux-ci, il en est une qui lui demeure particulièrement chère et qui, réciproquement, a marqué en profondeur ceux avec qui il a travaillé : Les Elèves-Maîtres des Ecoles Normales, les membres des Equipes Enseignantes et la Paroisse universitaire.

A ce titre, les chapitres qu’il leur a consacrés l’ont amené à rencontrer les problématiques de la laïcité, cet « objet singulier » (p. 92)qu’il lui fallut, en quelque manière, apprivoiser. Par là, l’ouvrage prend place parmi ceux, si nombreux aujourd’hui qui se situent dans le même champ. Cependant, le plus souvent, ce thème donne lieu à une approche d’ordre théorique, qui, à partir de la polysémie du concept, entreprend d’évaluer la pertinence de ses diverses acceptions, comme leurs conséquences, limites et mérites respectifs. L’originalité de ce livre est, au contraire, d’en traiter de manière très concrète, à partir de l’expérience d’un aumônier qui découvre les difficultés des Normaliens à être et à se dire chrétiens. Et cela amène à une réflexion sur le « vivre ensemble ». Ainsi que le disent les auteurs de l’introduction, « prêtre, il reconnaît la valeur, pour la société, de la laïcité imposée par la république et la valeur, pour l’Église, de celles et ceux qui ont fait le choix d’une vocation laïque » (p. 13). Mais, « comment trouver un équilibre vivant, respectant chacun ? » (p. 94). Ces questions, le Père Bobichon les retrouve évidemment lorsqu’il devient aumônier diocésain de la Paroisse universitaire, c’est-à-dire des chrétiens de l’Enseignement Public, qui ont préféré l’option spirituelle et pastorale consistant à s’efforcer d’être non pas des éducateurs chrétiens, mais des chrétiens éducateurs. Le grand intérêt de ces pages est d’en montrer les objectifs et la signification, en même temps que la spécificité de ses enjeux, en réussissant à allier fermeté de la pensée et délicatesse relationnelle.

Encore faut-il aller plus loin : les autres chapitres analysent l’action du Père Bobichon dans les diverses paroisses lyonnaises dont il a été le curé. Et, parmi les principes qui l’ont guidé, il en est un qui est manifestement privilégié et sur lequel il n’a cessé d’insister : c’est le rôle des laïcs dans l’Église. Et, qu’il s’agisse de l’épineuse problématique des « viri probati », ou de la gestion et de l’animation des communautés chrétiennes, ces divers registres mettent en œuvre sa conviction que l’élargissement et la reconnaissance de leurs fonctions sont suspendus à leur formation. De même en va-t-il de leur participation au dialogue interreligieux ou de son Association des Fils d’Abraham, qui réunit juifs, musulmans et chrétiens. Or, quoique selon des modalités variées, c’est bien là aussi d’éducation qu’il s’agit. Le Père Bobichon apparaît donc à bon droit, dans la variété de ses tâches, comme éducateur de la foi vivante.

Guy Avanzini