Paris – Ed. Don Bosco – 2015 – 80 p.
La célébration du bicentenaire de Don Bosco a offert mille occasions d’analyser les divers aspects de sa pédagogie. Ainsi, le « 5ème congrès de l’éducation salésienne », réuni à Lyon en mars 2014, a très opportunément étudié la relation éducative, sur laquelle cet opuscule suscite une réflexion dense et bienvenue.
L’introduction pose d’emblée des questions pertinentes et bienvenues : à une époque marquée par la peur de l’avenir, l’essor de la violence, l’échec scolaire, peut-on sérieusement préconiser encore une pédagogie « optimiste et enthousiaste » (p. 8), transformatrice du monde et annonciatrice d’un avenir meilleur ? Celle-ci n’est-elle pas désormais discréditée, et vouée à paraître dérisoire ou naïve, voire incitatrice d’un laxisme coupable ? Sans doute les trois communications magistrales du colloque ne répondent-elles pas directement à cette question mais, chacune à sa manière, proposent-elles des vues éclairantes et, à divers titres, réconfortantes, en montrant le rôle de la relation éducative.
Une approche originale, d’ordre anthropologique, de M. Caron montre comment, en tant que personne humaine, l’enfant aspire à la relation et l’appelle pour se construire lui-même : même, c’est là que se situe la finalité de l’éducation : l’amener à entrer en relation, être introduit dans la dynamique de la transmission ; c’est ce qui l’autonomise sans l’insécuriser, en vue d’une « heureuse articulation du moi et du nous, de la liberté et de la communication »(p.13).Et, plus que jamais, « à l’heure de la génération numérique » (p.19), la relation asymétrique et présentielle entre l’adulte et l’enfant peut seule permettre à celui-ci de s’approprier le savoir comme d’acquérir un sens critique et d’équilibrer « culture du livre » et « culture des écrans » (p.21).
De la communication de Mme Barrère, nous retiendrons surtout, parmi beaucoup de remarques judicieuses, son analyse des « activités électives » des élèves, c’est-à-dire, celles qu’ils choisissent contre la culture scolaire : la télévision, l’ordinateur ou les jeux vidéo, les nouvelles addictions ; comment, alors, sauver la motivation aux savoirs et aux études ? Au terme d’une sorte d’approche phénoménologique de cet écartèlement entre deux registres culturels, elle souligne que ces « activités électives » introduisent de facto une « éducation sans école, une sorte de curriculum parallèle et disparate », qui justifie de se demander comment l’Ecole « peut et veut faire des exercices scolaires des épreuves de formation de soi » (p.43).
Enfin, dans un texte en forme de méditation, Marguerite Lena présente, avec la profondeur qui est la sienne, une étude sur l’éducation comme « promesse à tenir » (p.61). Eduquer, c’est en effet, pour qui dispose d’un minimum de maturité, prendre un engagement à l’égard de l’enfant, donner une réponse à la confiance que celui-ci accorde à l’adulte. C’est aussi le considérer comme une promesse, c’est-à-dire comme mystérieusement porteur d’un potentiel, qui lui appartient, mais qu’il faut l’aider à déployer et à révéler : « les jeunes ne sont pas des gêneurs, mais des promesses » (p. 66). Le jour où les éducateurs en seraient convaincus, le climat de l’Ecole en serait transformé. Mais sans doute faut-il pour cela qu’elle devienne salésienne !
Guy Avanzini