Tournai – Editions Fortuna – 2016 – 240 p.
Professeur de psychologie clinique à l’université de Bordeaux, M. de Boucaud expose ici de façon minutieuse et détaillée, à partir de sa propre activité, l’histoire mouvementée et complexe des relations entre l’Ecole Catholique et l’État. Selon son expression même, il s’agit d’une « chronique », qui « se propose de présenter les dynamiques et les tribulations des familles et de l’Enseignement Libre », (p.9)à partir des archives, de documents et de témoignages disponibles, comme de son rôle d’acteur au sein des APEL.
Ouverte par un avant-propos du Cardinal Ricard, cette « chronique » raconte une période de suractivité, marquée par la plus grande vigilance concernant les risques et les menaces d’atteinte à la liberté des familles. Elle commence en 1972, car c’est alors que M. de Boucaud est entré au Conseil d’Administration de l’APEL d’un lycée bordelais. A partir de cette date, il recense et analyse tous les débats, négociations et controverses auxquels il a été associé, tant en Gironde qu’à Paris.
Néanmoins, c’est évidemment à partir de 1981 que les tensions se renforcent, autour de la notion d’un « grand service public et unifié de l’Education Nationale », dont l’ambiguïté nourrit fortement l’inquiétude. L’auteur reconstitue, presque au fil des jours, et avec de longues citations de textes, la suite ininterrompue de rencontres, discussions, négociations et réunions publiques qui se déroulèrent pendant ces années, mais dont on ne saurait rapporter ici le détail, pour sauver une « association sans assimilation ». M. de Boucaud rend ici un hommage appuyé à Pierre Daniel pour la sagesse avec laquelle il a su combattre toute formule qui aurait compromis le caractère propre de l’Enseignement Catholique, sans créer des solidarités ou des amalgames politiques inopportuns. De même sait-il restituer et faire sentir le climat, à la fois lourd et effervescent, de cette période, comme décrire la genèse des manifestations qui se sont déroulées dans toutes les grandes villes de France, notamment à Bordeaux, et surtout celle, historique, du 24 juin 1984, qui devait entraîner le recul du gouvernement.
Sans doute regrettera-t-on quelques rapidités d’écriture, comme une densité abusive qui, oscillant constamment du plan local au plan national, s’avère un peu touffue et alourdie par de trop nombreuses et trop longues citations. Il reste que cet ouvrage apporte une contribution originale à la connaissance d’un épisode à la fois significatif et déterminant de l’histoire de la pédagogie chrétienne. Et l’on remerciera M. de Boucaud de cette recherche, qui est, en même temps, un beau témoignage personnel. Il souligne à bon droit que la cause de la liberté n’est jamais définitivement sauvée, mais requiert une incessante vigilance.
Guy Avanzini