Paris – Editions de l’Emmanuel – 2016 – 236 p.
L’objectif de l’auteure n’est pas d’ordre pédagogique. Il émane du regret que suscite chez elle l’absence d’un ouvrage de synthèse, qui présenterait « une histoire générale de la vie consacrée féminine » (p. 77). Son désir est de combler cette lacune et de réparer cette omission. C’est pourquoi, elle-même consacrée au sein de l’Emmanuel, elle a rédigé ce gros volume, qui étudie le sens, la raison de la constance, dès les origines du christianisme, et l’ampleur de ce véritable phénomène social que constitue l’émergence toujours renouvelée de l’engagement religieux féminin.
On appréciera d’emblée et à bon droit la réalisation de ce beau projet, la surabondance et la précision des informations rassemblées et, plus encore, le souci de souligner et de mettre en évidence le lien entre le type de fondation d’une époque déterminée et son contexte socio-pastoral et ecclésial, en particulier lors des périodes de renouveau et d’essor, due notamment à la diffusion internationale assumée par les Congrégations Missionnaires, sans exclure celles qui se consacrent, exclusivement ou partiellement, à l’éducation et à la scolarisation. Et l’on remarque spécialement le mouvement du XIXème siècle, cet « âge d’or des religieuses françaises » dont parle Gérard Cholvy. Au fil de la lecture, on admire la richesse de l’inventivité ainsi déployée, le courage des initiatives, l’intensité du sens spirituel et l’engagement plénier et inconditionnel de ces femmes données à Dieu dans le service du prochain. C’est un bel hommage qui est ainsi rendu aux personnes consacrées et à l’héroïcité de tant d’entre elles.
On regrettera seulement que la complexité du sujet ait, ici ou là, faussé le plan du développement, en particulier le positionnement des pages 214 et sq. sur Thérèse de l’Enfant Jésus et Elisabeth de la Trinité. Globalement, l’approche du XXème siècle manque du peu de recul. De même les problèmes canoniques liés aux vœux et à la clôture mériteraient-ils une analyse plus poussée. Enfin, il manque un index.
Ce beau livre paraît dans un contexte qui se veut délibérément valorisateur de la femme et de son rôle dans l’histoire des sociétés. Mais voici que, simultanément, un courant inverse se manifeste. Ainsi, un récent article du Monde : « des catholiques veulent rendre à l’Église sa virilité. Des laïcs et des prêtres multiplient les stages pour aider les hommes à se réconcilier avec leur masculinité » (mercredi 28 décembre 2016, p. 0) : ces textes disent la plainte de ceux qui déplorent une « féminisation de la vie en Eglise » (id.). Il n’y a évidemment pas, ici à trancher entre ces deux thèses. Du moins importe-t-il de signaler leur dualité.
Guy Avanzini