Paris, 2020, éditions Créer, 190 p.
Justement connue et estimée pour ses activités pastorales dans les établissements catholiques d’enseignement, Agnès Charlemagne vient de publier un livre qui est à la fois la synthèse de ses travaux antérieurs et l’ouverture à de nouvelles recherches. Elle part de l’idée que l’éducation religieuse ne saurait se réduire à transmettre aux adolescents un bagage théologico-pastoral achevé, auquel ils adhéreraient d’emblée. Elle considère, au contraire, qu’il convient de partir de leurs expériences existentielles ou de leurs problèmes, pour engager une libre réflexion qui puisse conduire à la formalisation de données religieuses proprement dites et favoriser un accès à l’Évangile. On le voit, il s’agit d’une véritable révolution copernicienne liée à un renversement d’ordre anthropologique. Il ne s’agit plus d’accueillir facilement une révélation, mais de chercher les questions, problèmes et difficultés qui conduisent à accueillir la parole de Dieu pour en discerner le sens. Mutatis mutandis, on pourrait comparer cette démarche, en didactique générale, à celle de Freinet : les textes libres produits par les élèves sont d’emblée traités comme des matériaux à partir desquels va s’élaborer leur culture : pour toi, qui est Jésus Christ ? Où est Dieu ? C’est à partir de questions de ce type que l’on va s’efforcer d’engager la réflexion.
Cette approche nouvelle et originale peut paraître prometteuse. Cependant, vu sa nouveauté et sans aucun préjugé malveillant, elle appelle à un examen approfondi pour en éviter toutes dérives. Il importe en effet, en la matière, d’écarter l’adoption de nouveautés séduisantes mais équivoques, ou de les refuser par rejet de l’improvisation. Il faut donc la soumettre à une évaluation théologique qui en identifie la pertinence. Par ailleurs, la pratique des « ateliers », manifestement très suggestive et bienvenue, appelle à une précision sur sa gestion et son déroulement : comment s’y prendre pour procéder à « l’extraction » de l’intuition de l’élève et à son élucidation proprement spirituelle et religieuse.
A vrai dire, ces deux questions sont voisines. L’évaluation est indispensable à la sécurisation de la démarche et la rigueur méthodologique de celle-ci est également très souhaitable pour favoriser les progrès que requiert aujourd’hui la démarche catéchétique. Les difficultés que celle-ci rencontre actuellement et l’évidence de son importance donnent à cette investigation une urgence inconditionnelle.
Guy Avanzini