Dominique Vermersch[1]
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1. Status questionis
Le contexte contemporain si ce n’est récurrent de crise des institutions conduit par effet de retour à revisiter la praxis de l’autorité ; et ce d’autant plus que certaines des institutions malmenées du moment sont régies par une hiérarchie enchevêtrée. Tel est le cas des entités éducatives pour lesquelles les diverses tutelles (publique, associative, ecclésiale…) sont appelées à réceptionner une délégation d’autorité parentale. S’il existe en outre une parenté étymologique entre autorité et éducation, la diffraction est néanmoins patente : tant dans les modes d’exercice de l’autorité que dans la compréhension qui en est donnée. Il suffit de voir d’un côté une certaine retenue voire suspicion quant à l’usage du mot autorité dans les diverses sphères d’activités afférentes à l’univers éducatif : qu’il s’agisse de l’entreprise, de l’école ou de la famille ; et par contraste d’un autre côté, l’emprunt en substitution de notions quelque peu transfuges : management, leadership… bref autant de poncifs dont l’usage inflationniste révèle par effet de miroir la situation corrélative de crise que traverse l’exercice de l’autorité.
Qu’expriment en réalité ces diverses voix à propos de l’autorité et de son exercice ? Afin de répondre à cette question, nous proposons en premier lieu un bref détour étymologique et définitionnel du concept d’autorité. Ceci nous permettra ensuite de caractériser la situation contemporaine de son exercice, afférent en l’occurrence à la tâche éducative. Nous élargirons enfin le propos à une figure libre, dans la pluralité de significations de cette expression, celle du fils prodigue de l’Évangile (Lc 15, 11-32) appelé à découvrir la surprenante et insondable profondeur de l’autorité paternelle.
2. Vous avez dit Autorité[2]
L’étymologie (auctoritas) nous rappelle que l’autorité n’est pas de prime abord synonyme de pouvoir mais renvoie à un acte créateur et fondateur ; et donc à l’auteur (auctor) d’une parole qui s’en porte le garant. Rappelons à ce propos Rm 13, 1-2 précisant qu’il n’est d’autorité que divine, révélée et explicitée par la Parole de Dieu, ce que nous tenterons précisément d’illustrer dans la suite par la parabole du Prodigue.
L’autorité est donc témoin d’une fondation originelle qui fait naître et fait grandir. Se distinguant ainsi du seul pouvoir, l’autorité vise à faire croître ; elle vise à l’autonomie de celui qui la reconnaît. Elle s’inscrit donc dans le temps et elle est donnée pour un temps. Ce sont ensuite, et d’une certaine manière, les évènements de la vie qui prennent alors le relais[3].
L’autorité est portée par une parole qui garantit la mémoire et la transmission. Il s’agit notamment de transmettre les connaissances de la fondation ; des connaissances érigées fréquemment en un savoir anthropologique et moral, dévolu à ce qui demeure, et donc universel. A cette fin, l’autorité s’inscrit dans l’universel et le symbolique, en visant à distinguer pour rassembler : les interdits, le langage, l’éthique, la loi, l’altérité.
Si l’autorité ne peut donc se confondre avec le pouvoir, elle a certes à voir avec celui-ci. Prenant chair dans la nature humaine[4], l’autorité s’érige suivant une construction anthropologique qui permet de légitimer un pouvoir et qui convoque à l’obéissance ; autrement dit, à la dépendance librement consentie à la parole d’un autre sans utilisation de la force. Soit à dire encore que l’autorité comme la vérité ne s’imposent que d’elles-mêmes. Hannah Arendt[5] considère ainsi que c’est l’Eglise qui a consacré cette distinction entre pouvoir et autorité à partir de la sentence évangélique : « rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Mt 22, 21). C’est-à-dire en laissant le pouvoir à César et en s’en remettant à Dieu de qui vient toute autorité[6]. Se révèle ici une tension saine et constitutive de la vie sociale, de la vie ecclésiale, et bien sûr de la vie éducative : dès lors que s’y entremêlent divers pouvoirs et autorités dont la légitimité peut être parfois questionnée. C’est précisément ce que nous sous-entendions en introduction par l’expression hiérarchie enchevêtrée. Dans le champ éducatif et universitaire, le pape Benoit XVI a pleinement illustré cette tension constitutive qui se déploie entre autorité, autonomie et vérité :
« Certes, La Sapienza était autrefois l’université du pape, mais aujourd’hui c’est une université laïque avec l’autonomie qui, en fonction du concept même de sa fondation, a toujours fait partie de la nature de l’université, laquelle doit exclusivement être liée à l’autorité de la vérité. C’est dans sa liberté à l’égard de toute autorité politique et ecclésiastique que l’université trouve sa fonction particulière, même pour la société moderne, qui a besoin d’une institution de ce genre »[7].
Résumons notre propos avec A. Bilheran qui reconnaît trois fonctions à l’autorité. En premier lieu, une fonction parentale d’engendrement : l’autorité renvoie alors aux fondements originels et inscrit une action dans un devenir, le temps étant sa matrice. En second lieu, une fonction identitaire et de conservation des origines qui recouvre la transmission, la mémoire et la garantie du lien entre passé et présent. Il s’agit en l’occurrence d’une fonction sécurisante et protectrice. Enfin, une fonction de différenciation qui, par-delà la conservation de l’identité, permet d’inscrire un projet, du neuf, un futur, ce qui suppose un enracinement fourni par les deux fonctions précédentes. Au sein de la relation asymétrique et inégalitaire dans laquelle se meut l’autorité, celle-ci donne un cadre, une loi, des repères qui interdisent et autorisent en vue de l’autonomie, de la liberté et de la responsabilité des personnes.
3. L’autorité mutante[8]
Cette triple fonction assignée à l’autorité révèle en creux la fragilisation et la contestation moderne de l’autorité dans les différentes sphères où elle est appelée à s’exercer : famille, école, cité, entreprise, corps intermédiaires… La métaphore génétique est ainsi souvent usitée pour affirmer que la notion d’autorité a subi de fortes mutations[9], au rythme corrélatif des évolutions sociétales. Parmi celles-ci, notons l’extension de la culture démocratique de l’égalité qui infléchit le standard des relations hiérarchiques en rapports horizontaux, mobiles et fonctionnels ; ce qui s’illustre dans la sphère entrepreneuriale par cette notion de management collaboratif et participatif où l’autorité –telle du moins qu’on la comprend – est sans cesse remise en jeu au gré des performances individuelles et de l’émergence voire de l’accaparement du leadership. Alors que l’autorité est par essence asymétrique donc inégalitaire, le consensus politique moderne est plutôt à l’heure d’un égalitarisme à tous crins, revendiqué mais non pratiqué dans les faits, source de confusions quant à la place de chacun et d’insécurités identitaires. Dans la théâtralisation du monde où chacun se retrouve acteur, le risque est avéré que sous le faux-semblant de l’égalitarisme, la fonction protectrice de l’autorité cède le pas à un struggle for life darwinien, ceci pour prolonger la métaphore évolutionniste.
Ce travestissement de l’autorité dans son expression hiérarchique est lui-même induit par le tempo du progrès technoscientifique et la course à l’innovation qui démonétisent très rapidement les héritages de compétences acquises par les générations passées et enseignés à l’Université[10]. C’est en ce sens que la crise de l’autorité renvoie à une crise de la temporalité[11]. Tout se passe comme si en définitive l’autorité recevait sa forme d’expression de la technique elle-même, comme en témoignent les « techniques » de management, les « portefeuilles » de compétences, ou encore les modes d’apprentissage au sein desquels la pédagogie n’est plus vécue d’abord comme un exercice de l’autorité. De tout cela, il en résulte une certaine fugacité, confortée d’une certaine manière par le pluralisme éthique et religieux qui relativise de facto les diverses autorités magistérielles : celles-ci ne se reçoivent plus « d’en haut » mais se font et se défont par consensus fluctuant[12].
Et en effet, plus que sur un savoir anthropologique progressivement constitué et éprouvé, c’est plutôt à partir de l’opinion du nombre, ou de ceux « qui savent », que l’autorité s’impose. Bien que souvent brutal, précaire voire totalitaire, le règne médiatique de l’opinion imposé par le zapping des réseaux sociaux est préféré au savoir disciplinaire, soit un savoir qui nécessite justement une discipline pour son acquisition. Mais un tel savoir est désormais souvent contesté, relativisé, méprisé voire ignoré. En corollaire, chacun s’autoproclame « sachant » sur les toiles des réseaux sociaux : thérapeute, expert, coach… Ceux-ci sont sollicités par les managers et les leaders, dès lors que ces derniers perçoivent la dimension congénitalement précaire de l’autorité dont ils sont détenteurs. Ils peuvent être sollicités également par les subordonnés lorsque le management dérive vers une logique tyrannique et aliénante ; et au sein de laquelle se révèlent des comportements pervers qui précisément fleurissent à mesure que l’individu est soumis à l’autorité du nombre, de la masse, et non plus à une autorité personnelle.
Parce que l’autorité provient en définitive de l’auteur d’une Parole qui s’en porte le garant, l’aventure périlleuse mais salutaire du fils prodigue de l’Évangile (Lc 15, 11-32) révèle en creux une figure personnelle et paternelle de l’autorité ; une figure dont nous nous proposons de confirmer la pertinence au regard du questionnement critique que nous venons d’opérer.
4. L’autorité… prodigue[13]
« Un homme avait deux fils ». Deux paraboles évangéliques commencent par ces premiers mots. La première dite des deux enfants se trouve dans Mt 21, 38-32 et relate l’histoire d’un père qui envoie ses fils travailler à sa vigne. Le premier refuse dans un premier moment mais, pris de remords, se résout finalement à y aller ; à l’inverse du deuxième qui s’engage avec enthousiasme devant son père pour rejoindre la vigne… pour finalement ne pas y aller. L’autre parabole est celle du fils prodigue (Lc 15, 11-32) où il est d’abord question d’hériter plutôt que de travailler…
« Un homme avait deux fils » : la récurrence de l’expression nous renvoie à une condition humaine originelle et universelle : celle de la paternité, de la succession des générations ; celle de la tâche d’éducation et de transmission, celle de l’accomplissement de la génération précédente dans la suivante, par-delà la diversité des trajectoires de nos chères progénitures ; diversité et pluriel suggérés déjà par le chiffre deux.
Entre joies profondes et souffrances intimes, patience et prière : tout s’y mêle dans cette expérience existentielle, dans cette quête d’accomplissement, dans ce projet de vie : pour le père comme pour ses fils, pour les parents comme pour les enfants, pour les fils comme pour les filles. Autre point commun des deux paraboles qui nous invite à la foi et à l’espérance : les enfants apparemment mal partis finissent plutôt bien ! Dans l’Evangile de Luc, seul le plus jeune semble être passé à la postérité, mais les propos et comportement du fils aîné sont tout aussi instructifs.
La raison prodigue
Cette même parabole est une invitation faite la raison humaine pour réfléchir, pour se réfléchir : le fils prodigue sera pour nous ici la raison prodigue[14]. Autrement dit, le cheminement du fils cadet symbolise celui-là même de la raison, de la liberté de l’intelligence humaine en quête de son accomplissement. Dans cette histoire tumultueuse, la raison prend conscience d’elle-même ; elle advient à elle-même et s’auto-constitue d’une certaine manière ; plus encore, elle prend conscience de son devenir, de sa destinée. Et tout cela prend chair de manière native et éminente au sein de l’institution éducative, scolaire puis universitaire, lieu même où raison et liberté se forgent une destinée commune.
« Un homme avait deux fils ». Cette accroche symbolise, nous l’avons dit, une bonne part de la condition humaine, le projet d’accomplissement d’une génération dans la suivante, le projet d’éducation et de transmission. Cette tâche n’est pas aisée par les temps qui courent ; et elle ne l’a vraisemblablement jamais été. Pour une part, elle est remise dans les mains de l’école, puis dans celles de l’Université. Tâche apparemment redoutable et qui d’une certaine manière nous échappe, même si les sciences de l’éducation sont un des cœurs de métier revendiqués de l’Université, et plus particulièrement de l’Université Catholique.
Autonomie, vérité, liberté… ces éléments de vocabulaire sont aujourd’hui difficiles à conjuguer au sein même de la tâche éducative et universitaire. Celle-ci renvoie à une expérience existentielle, à la formation des jeunes intelligences, à des projets de vie en devenir. L’exercice semble démesuré, lorsqu’on est en outre saisi par l’ivresse du progrès technologique, par les incertitudes sociétales et environnementales du moment qui constituent une prise en tenaille mettant en doute l’utilité, la possibilité de raisonner, ou du moins de rationaliser la tâche éducative contemporaine. Tout se passe comme si la compréhension, les mots, la grammaire nous manquent parfois pour penser, vivre et accomplir cette tâche. Comme si la raison pédagogique feint d’y croire mais n’y croit plus, comme si cette raison manque de foi, comme si la raison (prodigue) aurait quitté la demeure de la foi…
L’autorité de la foi
Ceci posé, la foi est-elle à même d’épauler la raison dans les moments difficiles ! Mélange des genres s’offusqueront certains. Proposer la foi comme marchepied et comme horizon n’est cependant le propre : ni de l’Université catholique, ni de l’école catholique, ni de toute autre institution éducative et religieuse. Au-delà des significations qui peuvent lui être associés, la foi est au fondement de tout acte pédagogique. C’est ce que rappelait déjà Emile Durkheim, quitte à prophétiser un peu rapidement la disparition de la foi chrétienne : « … aucune foi nouvelle n’est encore venue remplacer celle qui disparaît. La mission d’un enseignement pédagogique est précisément d’aider à l’élaboration de cette foi nouvelle et, par suite, d’une vie nouvelle. Car une foi pédagogique, c’est l’âme même d’un corps enseignant. »[15] .
La foi pédagogique, âme du corps enseignant ? L’assertion est forte mais rappelée par l’étymologie. Parce que le professeur, c’est celui qui « professe » publiquement en engageant sa responsabilité. C’est celui qui donne, non seulement une parole, mais sa parole, en invitant l’auditoire à le croire, à lui faire confiance. Professer, c’est ainsi faire « profession de foi »[16] : c’est s’engager et se donner personnellement dans la parole énoncée. Professer, c’est tout autant transmettre un savoir que « donner à croire »[17]. D’une part en effet, un savoir transmis se donne d’abord à croire avant de se laisser démontrer ; il se donne précisément à croire par celui ou celle qui professe, par sa parole, par son être même. D’autre part, tout savoir se heurte aux limites du démontrable et ne se rend pas d’emblée au stade de l’évidence. Cette dernière nécessite un certain pas de temps, la médiation interpersonnelle entre l’étudiant et le professeur, mais également la conjugaison et le dialogue entre savoirs et disciplines, pour que précisément nous puissions « nous rendre à l’évidence ». Il s’agit donc non seulement de croire mais de donner à croire. Car une foi digne de ce nom est contagieuse, elle se transmet ; la contagion est transmission. Tel est donc, toujours selon Durkheim, le cœur de la mission de l’enseignement pédagogique : « Elaborer [une] foi nouvelle, et par suite une vie nouvelle ».
Quelle est aujourd’hui notre foi pédagogique et éducative ? Comment pourrait-elle s’incarner ? Une foi véritable prend acte de ce qui est. Elle prend rigoureusement acte de l’existant, non pour le subir, non pour s’en contenter, mais pour suggérer et défricher de nouveaux possibles, de nouveaux espaces de liberté et de responsabilité. Autrement dit, une foi éducative lit la réalité en creux : elle lit la négativité de la réalité comme un appel. Elle considère ainsi la multiplicité des sollicitations et des injonctions parfois contradictoires adressées à l’institution scolaire et universitaire comme autant d’opportunités à saisir afin que celle-ci puisse révéler et exprimer son identité, son autonomie, sa liberté ; précisément pour faire naître des jeunes libertés en devenir. Autrement dit et en un mot : son autorité. La foi de l’institution éducative, c’est ce qui donne forme à l’autorité dont elle est dépositaire. Et c’est encore en ce sens que la foi avive et ravive l’audace de la raison ; la foi est l’audace de la raison. Autrement dit, si l’institution éducative catholique peut revendiquer un caractère propre, c’est-à-dire si elle peut faire autorité, c’est précisément dans sa faculté de se prémunir contre toute emprise utilitaire totalisante. Car en subissant celle-ci, la tâche éducative confisquerait les jeunes intelligences pour les sacrifier toutes entières aux seuls faisable, monnayable et rentable, soit un bien peut être utile mais profondément réduit et donc falsifié. Lorsque la raison perd la foi, elle perd dans la foulée le visage et la réalité de l’amour. Telle est a contrario la preuve existentielle que la raison véritable et l’amour véritable coïncident dans le réel de chacune de nos vies. Et telle est l’expérience bouleversante du fils prodigue, de la raison prodigue.
« Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient »
En attendant ce jour, cette raison prodigue est bien décidée à larguer les amarres de la demeure de la foi, de la demeure du père : « Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient ». La liberté de la raison humaine, cette liberté jeune et fougueuse, est bien déterminée à quitter la demeure du Père, la demeure de la Sagesse. Ce divorce dramatique entre foi et raison a évidemment une longue histoire qui flirte avec celle de la modernité. En prenant acte de ce divorce, l’institution scolaire et universitaire la vit dans sa chair ; à un point tel que faire dialoguer foi et raison dans l’enseignement et la recherche relèverait pour les uns du non-sens, du « pas sérieux », du malhonnête ou du tabou… pour d’autres du seul horizon de sens qui vaille la peine d’être exploré. Si bon gré, mal gré, l’institution éducative vit dans sa chair ce divorce entre foi et raison, c’est qu’elle semble mettre ses pas dans les pas du fils cadet ; qu’elle prête sa chair à cette épreuve de la liberté humaine ; à moins qu’elle ne soit tentée à l’inverse par le repli frileux sur soi, le repli identitaire, le « entre soi » à l’image du fils aîné de la parabole, campé sur ses propres certitudes et qui n’a pas pris la peine de les éprouver.
« Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient ». Pour l’avoir vécu peut-être dans nos propres familles, nous connaissons tous ces histoires trop fréquentes d’embrouilles qui dilapident, souvent sans crier gare, un capital patiemment accumulé : non pas tant financier mais un capital de bonne entente entre parents, enfants, petits-enfants ; et au profit de quoi ? De l’accaparement d’un autre capital, d’espèces plus sonnantes… mais peut-être aussi plus trébuchantes. Bref, c’est peu dire que le fils prodigue n’y va pas « par le dos de la cuillère » auprès de son père : « …donne-moi la part d’héritage qui me revient ». Il s’agit du plus jeune fils, c’est-à-dire d’une jeune liberté qui demande à solder les comptes auprès de son père. Ce père qui dispose d’un capital dont il a peut-être lui-même hérité et qu’il s’évertue à faire fructifier, depuis de longues années déjà. Le fils aîné semble d’ailleurs suivre la même ligne : bosser dur, bosser pour bosser, bosser sans liberté. Voyant ainsi trimer son frère aîné, c’est ce qui a peut-être conduit le plus jeune à aller dehors, à aller « voir » ailleurs ce qui se passe, bien décidé à attester de sa liberté, à ses risques et périls. Dans la parenté étymologique entre autorité et éducation, « conduire » ou « mener dehors » nous renvoie précisément à éduquer : « ducere » avec le préfixe « ex », i.e « en dehors ». Autrement dit, éduquer c’est former pour mettre dehors. Le frère aîné endosserait ainsi – en creux – une responsabilité éducative dénaturée vis-à-vis de son frère prodigue. En exerçant notre liberté pour le meilleur comme pour le pire, nous contribuons à la tâche éducative. Qu’est-ce en effet qu’éduquer si ce n’est contribuer à faire croître la liberté d’autrui ?
Eduquer au don
Eduquer pour les parents, c’est contribuer à faire advenir la liberté de nos enfants ; c’est les « mettre au monde ». Comment instruire pour mettre dehors ? Comment mettre au monde ? A la vue du fils prodigue de l’Evangile comme de son frère aîné, la tâche est périlleuse : le premier a précipité sa sortie, tandis que l’autre a manifestement quelque mal à « couper le cordon ».
Comment mettre au monde et pourquoi mettre au monde ? Ces questions peuvent être éclairées par le mystère de la Nativité : « Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune. » (Lc 2, 1-14) Voilà comment Marie mit au monde Jésus dans la foi en offrant librement toute son humanité et toute sa féminité afin que le Verbe de Dieu puisse prendre chair et se faire l’un de nous[18].
Si éduquer, c’est mettre au monde, la Vierge Marie se présente alors comme un modèle de la tâche éducative ; une tâche dont la finalité s’exprime dans les conditions brièvement rapportées de la venue au monde de Jésus : « … elle l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire ». Comme seul berceau, une mangeoire, préfigurant ainsi le don de Dieu inouï qui nous est fait, le don de l’eucharistie. Qu’est-ce alors que la tâche éducative, si ce n’est indiquer le chemin du don comme chemin d’accomplissement ? Eduquer c’est apprendre à se donner librement, car l’homme ne s’accomplit pleinement que dans le libre don de soi. Car le mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe incarné[19].
La tâche éducative consisterait donc en l’apprentissage du libre don de soi : le chemin éducatif, c’est le chemin du don. Tout cela est bien, beau et louable en théorie me direz-vous, mais est-ce véritablement audible et compréhensible ? A commencer par le vocabulaire utilisé : éduquer à la générosité s’entend encore mais qu’est-ce peut bien vouloir dire aujourd’hui « le libre don de soi » ? Par-delà le côté un peu chevaleresque voire idéaliste de l’expression, celle-ci ne serait-elle pas à réserver raisonnablement aux vocations sacerdotales et religieuses ? Le libre don de soi est-il vraiment synonyme d’accomplissement ?
Et, de fait, il faut souvent le recul des années vécues en tant que parent mais aussi en tant qu’enfant, voire l’expérience de toute une vie pour saisir à quel point le don de soi constitue le mouvement même de la vie ; que donner invite à se donner ; que le don entraîne le don ; que le don de soi est contagieux et se reçoit tout autant qu’il s’apprend, raison pour laquelle il constitue l’âme de la tâche éducative et signe la maturité de la personne humaine.
Bref, plus qu’une question de vocabulaire, le don de soi est une question de grammaire à maîtriser. En effet, au terme savant d’anthropologie du don peut se substituer celui peut-être plus évocateur de grammaire du don qui, comme une grammaire linguistique, exprime des règles à première vue rébarbatives, parfois ardues à ingurgiter, voire contre-intuitives. Mais comme pour toute grammaire linguistique, une fois maîtrisée et possédée, elle constitue le marchepied de la liberté et de la créativité.
Comme premiers éléments de cette grammaire du don, retenons simplement que le don est appelé tout d’abord à être reçu, puis approprié, et puis enfin offert. Et de cette grammaire du don, le fils prodigue de l’évangile n’en possède manifestement qu’une compréhension très partielle voire pervertie, lorsqu’il quitte la demeure paternelle : « Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient ». Qui dit grammaire, dit possible faute de grammaire et celle-ci sera lourde de conséquences pour le fils qui, en effet, n’entend pas l’héritage du père comme un don à recevoir mais comme un dû : « donne-moi la part qui me revient ». Et le père fit le partage de ses biens.
Gestion et transmission de patrimoine
« Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient ». Mais, au fait, quelle est la part qui lui revient ? Cette revendication pour le moins pressante et brutale du fils prodigue qui n’entend pas l’héritage du père comme un don à recevoir mais comme un dû : « donne-moi la part qui me revient », c’est à moi. Le pactole du père, il est encore dans son coffre-fort mais il m’appartient, c’est à moi désormais de le posséder voire de le liquider. Plutôt que de recevoir, ou plus précisément de continuer à recevoir, le fils veut récupérer ce qu’il croit être son dû.
Ce passage du don, c’est-à-dire « je reçois », au dû, c’est-à-dire « je prends », ce passage est un changement complet et radical de perspective. Car en passant du « je reçois » au « je prends ou je récupère », ceci conduira le fils prodigue à une issue radicalement opposée à ce qu’il escomptait. Ceci va le conduire sur un chemin de déshérence. Or qu’est-ce que la déshérence si ce n’est, au sens propre du terme, se faire ou plutôt se laisser déshériter ?
Et en effet, l’expérience ô combien éprouvante mais salutaire du fils prodigue lui apprendra au moins une vérité essentielle : il y a des connaissances, des choses, des réalités, des manières d’être qui ne peuvent qu’être reçues et non pas prises ni même revendiquées. A vouloir les prendre ou seulement les revendiquer, on les dénature immédiatement. C’est le cas de l’amour qui ne peut : ni se prendre ni s’exiger mais seulement se recevoir.
Ceci posé, les uns reçoivent ce que d’autres transmettent. Les enfants reçoivent ce que les parents cherchent à transmettre ; la transmission est une réalité généalogique : on transmet le sang, le lien ancestral, le nom, un statut social, voire un métier. Mais on transmet également des croyances, la foi, des façons d’être, et ce, parfois à notre insu : c’est parfois ce qu’observent les parents, les enfants étant devenus adultes. Et c’est tout cela qui constitue le patrimoine qui a vocation à être transmis. Ce patrimoine que le père du fils prodigue ne demande qu’à transmettre, qu’à tout transmettre. Mais voilà, la transmission a ses règles ; des règles souvent implicites mais incontournables. Et c’est ce qu’apprit à ses dépens le fils prodigue.
Bref, entre le fils prodigue et son père se trouve posée la question du patrimoine et de sa transmission. Patrimoine : le plus jeune, comme probablement le fils aîné, en ont une compréhension assez étroite ; le patrimoine se réduit à des espèces sonnantes et trébuchantes. Et telle est la raison pour laquelle il comprend ce patrimoine comme un dû à revendiquer et non comme un don à recevoir. Mais de ce patrimoine, le père en a une compréhension beaucoup plus large, une compréhension essentielle pourrait–on dire, et qui motive le père à transmettre, à tout transmettre, à tout donner, et par là-même à se donner. Mais quel est-il ce caractère essentiel du patrimoine à transmettre ? Il suffit peut-être de poser cette question aux parents, de nous poser la question : que souhaitons-nous transmettre de plus essentiel à nos enfants ? Qu’est-ce qui nous tient le plus à cœur ? Il semble que la réponse ne se tient pas d’abord dans les biens matériels, les biens immobiliers, dans les comptes épargne… même si vouloir garantir un avenir à nos enfants constitue une raison bien commode et présentable pour continuer à amasser. Mais au fond nous savons que là n’est pas l’essentiel : quelles que soient nos convictions de foi, nos convictions morales et religieuses, nous cherchons, nous désirons plutôt transmettre des valeurs à vivre et à partager. Et pour les croyants que nous sommes ou que nous essayons d’être, nous désirons transmettre à nos enfants la foi ; la foi qui sera à même de nourrir des valeurs de vie.
Le problème, c’est que nous ne sommes pas maîtres de la transmission ; pour une part, elle nous échappe ; et c’est plutôt heureux qu’elle nous échappe car est en jeu le mystère des libertés humaines. Ainsi, lorsque le fils prodigue interpelle son père : « Père, donne-moi la part d’héritage qui me revient » : à ces mots même, à ces seuls mots, le père comprend dans l’instant que l’essentiel de ce qu’il voulait transmettre ne l’a pas été. Cruelle déception, terrible désillusion pour le père qui n’est que don et qui voulait seulement indiquer à son fils le chemin du don, apprendre à se donner. Comme si jusqu’à ce jour, le fils n’avait rien reçu de son père ; que son père ne lui aurait rien transmis. « Donne-moi [ce…] qui me revient » : à ces seuls mots néanmoins, le père comprend avec effroi que ce qu’il voulait transmettre – à savoir apprendre à se donner – ne l’a pas été… du moins apparemment.
L’échec éducatif serait donc retentissant. Echec perçu que nous avons peut-être vécu en tant que parent, en tant qu’enseignant ; ou que nous vivons douloureusement au travers des choix ou des non-choix de tel ou tel de nos enfants ; de l’incompréhension mutuelle et des souffrances intimes que tout cela peut susciter. Mais à voir en définitive l’heureuse destinée du fils prodigue, l’échec éducatif n’a peut-être que l’ombre de l’apparence. Trouvant en lui le ressort de l’humilité et du courage pour revenir au bercail paternel, le fils a fourni la preuve de ce que lui a effectivement transmis son père. Parce qu’en effet, il faut du temps, beaucoup de temps et de recul, pour prendre la mesure de ce qui a été véritablement transmis, souvent d’ailleurs à notre insu ; comme il en faut également parfois beaucoup pour saisir la part de notre responsabilité dans ces bugs de transmission. Mais en attendant, et pour les parents, c’est le temps du renoncement aux illusions perdues ou aux ambitions mal placées ; mais aussi et d’abord le temps du discernement de la pédagogie divine toujours à l’œuvre dans cette épreuve et qui invite à faire sien ce conseil de sainte Mère Teresa évoquant l’action de Dieu dans nos vies : « … acceptez tout ce qu’Il donne, et donnez tout ce qu’Il prend avec un grand sourire. Car c’est cela la sainteté – faire sa volonté avec un grand sourire ».
« … acceptez tout ce qu’Il donne, et donnez tout ce qu’Il prend avec un grand sourire » : Cette attitude pour le moins passive semble bien être celle du père du fils prodigue ; même si la parabole ne dit pas si le père avait le sourire lorsqu’il consentit sans broncher à l’injonction de son fils : « Et le père fit le partage de ses biens ».
« Et le père fit le partage de ses biens »
Réaction passive et déconcertante du père à son fils prodigue qui lui sommait de partager l’héritage. Une réaction sans voix : rien, pas une parole, silence radio… un silence pourtant qui en dit long ou plutôt une parole silencieuse, à l’image presque de celle d’un enfant – infans -, c’est-à-dire celui qui, précisément, est sans voix.
Car enfin, un père digne de ce nom n’aurait-il pas dû essayer une dernière fois de raisonner son fiston, de le ramener à la raison ? A l’évidence, le père pressentait bien le chemin chaotique et plus que périlleux, le chemin de possible non-retour dans lequel comptait s’embarquer son fils ! Et pourtant, rien, pas une parole, pas un geste pour le retenir. Le père reste-t-il interdit à ce point, tant il est effrayé des embûches du chemin que s’apprête à prendre son fils ? De plus quel contraste, lorsque ce même père suppliera son fils aîné de rentrer à la maison pour fêter le retour de son plus jeune frère !
Pourquoi donc ce laissez faire du père, pourquoi ce « laisser aller » à première vue incompréhensible ? Une telle attitude nous place en fait au cœur de la raison éducative… ou plutôt de la foi éducative. Comme le rappelle en effet le dictionnaire Littré, « Education est un mot récent, autrefois on disait nourriture ». Eduquer ce serait donc aussi nourrir. Probablement effrayé du chemin que s’apprête à prendre son fils, le père se rend compte qu’il n’est pas suffisamment « éduqué », c’est-à-dire « nourri » pour en affronter les embûches. Et le père veut donc le nourrir une dernière fois : il voudrait le gaver, avant qu’il ne prenne la route.
Et comment ? Tout simplement en lui gravant dans sa mémoire et dans son cœur l’image d’un père qui a infiniment respecté et honoré la liberté de son fils ; plus encore, en gravant dans sa mémoire et dans son cœur l’image d’un père qui n’est que bonté et miséricorde. C’est précisément parce que le fils prodigue aura gardé dans sa mémoire et dans son cœur une telle image de son père, qu’une fois au fond du trou, il sera encore capable de discerner la voie sans issue dans laquelle il s’est plongé librement ; et qu’il trouvera ensuite l’élan pour se ressaisir librement et revenir à la maison paternelle. Comme quoi éduquer est tout autant affaire de raison que de patience et surtout de foi.
En d’autres termes, si le père ne dispense pas la moindre parole pour retenir son fils prodigue, c’est pour que celui-ci advienne à une véritable liberté sans « téléguidage » pourrait-on dire. Et de fait, nous le savons bien : le téléguidage est totalement contreproductif ! Le père ne veut à aucun prix dévoyer et entraver la capacité de discernement de son fils. Et pour cause ? C’est précisément cette capacité de discernement qui restera sauve et qui permettra au fils de se ressaisir – alors qu’il est au fond du trou – qui lui permettra de se ressaisir pour prendre le chemin du retour.
Ne pas retenir son fils : le père met sa foi à rude épreuve. Et puis, l’exercice n’est pas facile, pas du tout facile, c’est de la chirurgie fine ! Nous l’avons peut-être vécu à l’occasion de conseils ou d’objections auprès d’enfants devenus grands ou auprès d’amis qui s’apprêtent à prendre des chemins de traverse. C’est plutôt l’affection, l’attention, la proximité bienveillante voire la compréhension à leur égard qui nourrira leur discernement, leur courage dans les décisions à prendre et les éventuels retournements à opérer. Car, comme le rappelle St Augustin, « on n’entre dans la vérité que par la charité » sachant que nous n’avons le monopole : ni de l’une ni de l’autre.
Il nous est donné ainsi de saisir concrètement et existentiellement combien liberté et vérité se nouent existentiellement une destinée commune[20] ; liberté et vérité dessinent un chemin, une route qui est en définitive celle de l’homme lui-même. En prenant la route, le fils prodigue ne fait donc qu’embrasser le propre de la condition humaine qui est d’être en chemin, homo viator, en quête de vérité comme en quête de liberté, les chemins se croisent et se recroisent. Le cheminement du fils prodigue symbolise celui de la liberté de l’intelligence humaine en quête de son accomplissement. Cette liberté de l’intelligence est censée se déployer notamment à l’Université qui, de fait, prête sa chair à la réalité et à la condition du fils prodigue. Et ce d’autant plus, me semble-t-il, que cette Université ambitionne d’être catholique : en prêtant sa chair à la condition prodigue que nous partageons tous, elle propose un chemin d’humilité, de foi et de salut.
L’autorité prodigue
Concluons en relevant que nous n’en sommes qu’au deuxième verset de la parabole du prodigue, mesurant déjà la richesse insondable de cette figure de l’autorité paternelle ; une figure miséricordieuse mais une figure elle aussi prodigue ! Lorsque nous remarquons en effet que jamais une seule fois le père ne s’adresse directement à son jeune trublion, ne gaspille-t-il pas l’autorité dont il est dépositaire ? Alors qu’il suppliera de tout son être le fils aîné à passer le seuil de la maison, l’histoire nous laissant dans l’expectative à ce propos. Nous vous laissons poursuivre la lecture de la parabole, à l’aune de cette figure d’autorité, celle du père, c’est-à-dire l’autorité de la foi, autorité prodigue, autorité miséricordieuse, chemin enthousiasmant et d’Espérance dont notre monde a tant besoin aujourd’hui.
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Pour citer cet article
Référence électronique : Dominique Vermersch, « Autorité éducative, autorité prodigue », Educatio [En ligne], 12| 2022. URL : https://revue-educatio.eu
Droits d’auteurs
Tous droits réservés
[1] Recteur de l’Université Catholique de l’Ouest dominique.vermersch@uco.fr
[2] Cette deuxième section prend appui notamment sur Ariane Bilheran, L’Autorité. Armand Colin, 2009.
[3] Les évènements sont nos maîtres et nous apprennent à obéir à Dieu : « Si Dieu nous donnait des maîtres de sa main, ô qu’il leur faudrait obéir de bon cœur. La nécessité et les événements en sont infailliblement ». Les Pensées de Blaise Pascal [n° 8H recto]
[4] C’est ainsi que l’on peut évoquer quelqu’un en affirmant qu’il (elle) a une autorité naturelle.
[5] Arendt H., 1958, Condition de l’homme moderne. Paris, Calmann-Lévy. Repris de A. Bilheran (ibid.)
[6] Cf Rm 13, 1-2.
[7] http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2008/january/documents/hf_ben-xvi_spe_20080117_la-sapienza_fr.html
[8] Cette troisième section reprend largement Vermersch D., 2015, L’exercice de l’autorité dans le ministère du prêtre Munus Regendi. Colloque au Séminaire pontifical français, Rome, 13-15 février (p. 21–32). Ed. Parole et Silence.
[9] A ce propos, Léna M., Temps de crise, temps de grâce ? La Documentation Catholique, 7 février 2010, n° 2439.
[10] Ce qui fait dire à Jean-Luc Marion : « La chose enseignée dure moins longtemps que le temps mis pour l’apprendre. »
[11] A. Bilheran, ibid.
[12] Est-ce pour cette raison que le principe axiomatique « le temps est supérieur à l’espace » avancé par le pape François se devrait d’être manié avec précaution du fait précisément d’un risque avéré de diffraction magistérielle ?
[13] Cette section s’appuie largement sur Vermersch 2018, La raison prodigue. Revisiter la tâche éducative et universitaire. Ed de l’Emmanuel.
[14] Cette correspondance se retrouve dans trois lectures : Chapelle A., 1988, Les Fondements de l’Ethique, la symbolique de l’action. Editions de l’Institut d’Etudes Théologiques, coll. IET, 210p. Ratzinger J., Interprétation, contemplation, action. Discours tenu à l’occasion du 25ème anniversaire de l’Université catholique de Bavière, 27 juin 1982, Munich. in Joseph Ratzinger, Eglise et Théologie, Mame, Paris, 226p. Laffitte J., 2000, L’agir rationnel du croyant. L’apport de l’encyclique Fides et Ratio à la théologie morale. Studia Moralia 38 (2000) 523-539.
[15] Durkheim E., L’évolution pédagogique en France. PUF, 1ère édition : 1938 ; 2ème édition « Quadrige » : 1999, février, p. 15.
[16] Jacques Derrida est un philosophe qu’on ne peut soupçonner d’accointances confessionnelles et religieuses. Dans « L’Université sans condition », conférence prononcée initialement à l’Université de Stanford en 1998, il rappelle que la langue anglaise ne donne pas d’autre sens que religieux au verbe professer, et ce jusqu’au 14ème siècle au moins.
[17] Entre croire et savoir, il apparaît une intrication profonde qui relève plus généralement de ce dialogue synergique entre la foi et la raison
[18] FR n° 108
[19] GS n° 22.
[20] « Vérité et liberté, en effet, vont de pair ou bien elles périssent misérablement ensemble Jean-Paul II, 1998, Encyclique Fides et ratio, n° 90.