La Gestion mentale : une pédagogie de la personne

Fondements éthiques et implications praxéologiques

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Jean-Pierre Gaté*

Résumé : La Gestion mentale d’Antoine de La Garanderie (1920-2010) propose un renouvellement de la pédagogie qui s’inscrit dans la dynamique de « l’apprendre à apprendre », avec le souci de rendre l’apprenant acteur et autonome dans la conquête des savoirs. Même si elle ne s’affiche pas explicitement comme une pédagogie « personnaliste », cette approche n’en comporte pas moins une dimension personnaliste, repérable autant à travers ses fondements éthiques que dans ses implications praxéologiques. Ainsi, en prenant appui sur une double caractéristique de la personne, tout à la fois « unique, irréductible, inassimilable à toute autre » et « ouverte à l’universel » (Avanzini, Mougniotte, 2012), cet article tente de relire, à l’aune de cette dimension, les écrits les plus suggestifs d’Antoine de la Garanderie ainsi que les expériences pédagogiques qu’il a inspirées.

Abstract : The Mental Management theory elaborated by Antoine de La Garanderie (1920-2010) offers a pedagogical renewal following up the “learning to learn” process with a view to making learners more active and autonomous in their quest for knowledge. Even if this theory is not by nature a « personalistic » pedagogy, its approach falls within the scope of personalism judging by its ethical foundations and its praxeological implications. Drawing from a double characteristic of the person, both “unique, irreducible and impossible to blend within others” but also “universal mind” (Avanzini & Mougniotte, 2012), this article offers a new attempt at an interpretation of the most eloquent writings of Antoine de la Garanderie and the pedagogical experiments they inspired.

Dans le contexte actuel d’une société de l’information et de la communication dont la diversité et la complexité des modes d’accès ou d’appropriation sont parfois source de désarroi chez les jeunes comme chez les adultes, la Gestion mentale d’Antoine de La Garanderie (1920-2010) propose un renouvellement de la pédagogie qui s’inscrit dans la dynamique de « l’apprendre à apprendre » avec la ferme volonté de rendre les apprenants authentiquement acteurs de leurs apprentissages et autonomes dans la conquête des savoirs que la culture humaine met à leur disposition.

Même si elle ne s’affiche pas explicitement comme une pédagogie « personnaliste » ni ne se revendique d’un courant proclamant haut et fort cette référence ou cette désignation, il n’en demeure pas moins qu’une dimension personnaliste est repérable autant à travers ses fondements éthiques que dans ses implications praxéologiques.

Selon Guy Avanzini et Alain Mougniotte[1], la prise en considération de la personne présente une double caractéristique : d’une part, « elle est unique, irréductible, inassimilable à toute autre », chacune ayant « son talent, ses capacités, son potentiel… » ; d’autre part, « elle est ouverte à l’universel », ce qui appelle une relation à l’autre et justifie, de fait, le recours à l’éducation pour favoriser cette articulation entre le potentiel de chacun et la culture de l’humanité qui s’offre à lui. Au regard des écrits dont nous disposons et des expériences pédagogiques qu’il a inspirées, Antoine de La Garanderie ne pourrait que souscrire à cette valorisation de la personne ainsi définie, ce que nous allons tenter de montrer dans les limites de cet article en parcourant, de ce point de vue, ses propositions les plus significatives.

1.    Vers une éthique du connaître

La valeur de la personne, porteuse de potentialités singulières à explorer et ouverte à l’universel, constitue bien un principe fondateur de la pédagogie d’Antoine de La Garanderie. Son œuvre en témoigne, ainsi d’ailleurs que de nombreuses références à des auteurs qui la promeuvent, que ce soit du côté des philosophes (Ricœur, Maritain, Mounier…) ou des psychologues (Rogers, par exemple). Une telle invocation pourrait assez naturellement nous conduire à dégager une axiologie (du grec axios : qui vaut) à propos de la Gestion mentale. Toutefois, ce terme comporte une part d’ambiguïté dans la mesure où il risque d’induire, chez certains, l’idée que des valeurs où des normes extérieures s’imposent au sujet ou, pour le moins, le transcendent : le Bien, le Mal, le Juste, le Vrai, etc.

C’est la raison pour laquelle, nous préférons faire ici référence à la notion d’éthique qui s’appuie davantage sur le pouvoir-être du sujet. On raisonne certes sur ce qui est bon ou mauvais, mais en se plaçant du point de vue du sujet dans son rapport au monde. Selon Antoine de La Garanderie[2], une éthique du connaître apparaît plus descriptive que normative, puisqu’elle part de l’être du sujet et non d’un devoir être, posé a priori comme modèle et comme fin : « Il est capital que l’on soit dans le climat de vérité et que l’on fonde sur l’être de ce qui est, l’être de ce qui n’est pas encore puisque l’être de ce qui n’est pas encore ne pourra devenir que s’il a pour fondement l’être de ce qui est. »[3].

Le pouvoir-être du sujet réside dans les possibilités intrinsèques qu’il porte en lui-même. Il l’appréhende et le comprend dans son rapport au monde, d’où la nécessité, par exemple, d’interroger la relation concrète que l’enfant noue avec les choses[4] ; en partant de son pouvoir être, l’enfant découvre son pouvoir de sens par l’évocation.

Toutefois, il convient de souligner que cette éthique du connaître n’est nullement « relative ». De fait, elle s’appuie sur une épistémologie autant que sur une axiologie qui réfère à des valeurs d’humanité. Tout le cheminement pédagogique consiste donc à faire passer l’enfant de l’être à la découverte de son pouvoir être et du pouvoir être au devoir être. Dans cette perspective, nous proposons de développer trois idées forces attestant cette dimension personnaliste que nous repérons à travers l’œuvre d’Antoine de la Garanderie : le principe d’éducabilité de la personne, l’homme comme acteur de sens, la promotion de la liberté et de l’autonomie du sujet.

Le principe d’éducabilité de la personne

Si La Garanderie s’intéresse aux structures mentales inhérentes aux actes de connaissance, c’est d’abord et avant tout parce qu’il postule, en amont de toutes ses recherches sur la vie mentale, que l’adaptation à des tâches scolaires ou autres ne dépend pas uniquement de l’aptitude ou de l’effort. Pour lui, existent des processus mentaux, demeurés jusqu’à présent inaperçus, qui sont la raison directe de cette adaptation. Aussi la Gestion mentale propose-t-elle que l’on inverse la causalité linéaire couramment admise : ce n’est pas l’aptitude qui engendre les habitudes mais bien les habitudes mentales qui sont porteuses d’aptitudes déterminées. Cette idée est récurrente dans l’œuvre de La Garanderie. Déjà soutenue dans Les profils pédagogiques (1980), qui porte d’ailleurs comme sous-titre « discerner les aptitudes scolaires », elle est reprise avec force dans l’un de ses derniers ouvrages : Critique de la raison pédagogique : « …rien dans les connaissances en génétique n’autorise à affirmer que l’aptitude comprise dans le sens de capacité de performance soit innée. »[5]. C’est pourquoi il importe d’aborder la pensée en termes d’habitudes plutôt qu’en termes d’aptitudes. L’innéité de l’aptitude, la conception mystique du don et celle d’une intelligence innée et figée doivent donc être remises en cause. Dans cette éthique du connaître, sont mis entre parenthèses (c’est le sens de l’épochè phénoménologique), un certain nombre de présupposés : le discours théologique (« l’intelligence est un don de Dieu »), le discours biologique (« l’intelligence est génétiquement programmée ») et le discours sociologique (« l’intelligence est socialement déterminée »).

Selon Guy Avanzini : « L’idée de base de La Garanderie, c’est que l’intelligence est susceptible de développement et que l’éducation vise non seulement à faire acquérir des connaissances nouvelles, mais aussi à déployer des capacités intellectuelles supérieures à celles dont le sujet pourrait se croire muni. »[6]. En d’autres termes, l’intelligence n’est pas une quantité fixe, déterminée une fois pour toutes et dont les individus seraient plus ou moins pourvus, compte tenu des contingences de leur patrimoine génétique ou des aléas de leur histoire personnelle et sociale. Elle est un processus en développement, une structure modifiable et riche de potentialités opératoires. Ce concept de modifiabilité se trouve au cœur des travaux du Professeur Reuven Feuerstein, avec lequel La Garanderie partage des finalités proches[7]. Il ouvre sur l’éducabilité cognitive et, plus largement, l’éducabilité de la personne, tant il est vrai que l’intelligence n’est pas une fonction isolée mais anime et sous-tend la personnalité toute entière. L’un et l’autre prônent une même volonté de démythifier autant l’idéologie du don que le fatalisme du déterminisme social. Ainsi qu’ils le proclament haut et fort : « Les gènes n’ont pas le dernier mot » et il existe une marge de liberté de l’acteur, propice à l’éclosion d’un projet émancipateur.

Il y a donc une éducation possible de l’intelligence, dans la mesure où la perfectibilité est inhérente à la nature de celle-ci ; l’individu est éducable, car il est avant tout modifiable. Comme l’écrit Sylvie Murzeau : « Ce postulat de la modifiabiblité est un acte de foi, foi dans un homme qui peut se transcender, dépasser son état actuel, grâce à cette plasticité qui le caractérise et le rend perfectible ; il est donc « un être qui, réalise, qui continue la création » (Feuerstein, 1990), qui est habité par la liberté de se modifier en fonction de l’écosystème dans lequel il vit, afin de se retrouver dans son humanité. »[8] Cette conception est partagée par Antoine de La Garanderie. Elle témoigne de sa conviction en le pouvoir de l’homme et en sa capacité à se faire « plus homme », même si le fondateur de la Gestion mentale se réfère à d’autres concepts pour la mettre en œuvre. La perfectibilité est donc au cœur de l’éducabilité : rien n’est joué d’avance, tout est encore possible. Le sujet dispose de cette possibilité qui est de pouvoir signifier. Selon la Gestion mentale, ce pouvoir de signifier lui est donné par l’évocation. Evoquer, c’est vivre le sens des choses et c’est une expérience jubilatoire.[9]

En outre, et à l’inverse de plusieurs sciences connexes à la pédagogie, lesquelles consacrent leurs efforts à rechercher les causes pathogènes de l’échec scolaire, la Gestion mentale s’attache plutôt à trouver les facteurs philogènes de la réussite, c’est-à-dire les conditions de manifestation des aptitudes (scolaires, intellectuelles…). A cet égard, l’apport des sciences humaines est reconnu par l’auteur : « Grâce à la psychologie génétique, on sait ce qu’un enfant d’un âge déterminé peut ou non comprendre ; grâce à la psychologie de l’inconscient, on connaît beaucoup mieux les causes de désordres affectifs et leurs remèdes ; grâce à la psychologie expérimentale, on place l’élève dans de meilleures conditions de travail ; grâce à la sociologie, on connaît la mentalité des élèves, les causes sociales de leurs difficultés d’adaptation scolaire. Grâce à la didactique, on sait mieux comment communiquer le contenu d’un programme disciplinaire. »[10]. Cependant, l’ambition de la Gestion mentale est autre, elle est plutôt d’ouvrir à la connaissance des processus mentaux nécessaires à tout apprentissage. Il s’agit donc de délaisser l’étude des causes pour orienter les recherches sur cette question : que peut produire une conscience qui s’active lorsqu’elle cherche à connaître ?

L’homme comme acteur de sens

Dans son rapport au monde, l’homme n’est pas un récepteur passif d’informations. Il est en activité de sens car il dispose de cette possibilité de se mettre en projet de faire vivre dans sa conscience le sens des choses et des êtres qui se présentent à lui, ainsi que la manière d’en quérir l’intelligibilité.

Dans une situation d’apprentissage scolaire, il ne suffit pas d’expliquer à l’élève la loi qu’il doit comprendre, ni de lui donner les exemples lui permettant d’accéder à sa bonne compréhension. L’enseignant ne transmet pas le sens du savoir, il doit mettre l’élève en situation de l’accueillir. La sollicitation du projet de sens en est la condition, car l’élève ne peut être acteur de sens que s’il est en projet de sens. Mais cela suppose qu’il accède au sens… du projet de sens, d’où l’importance capitale du pédagogue qui invite l’élève à faire ce travail mental par la sollicitation de l’évocation et des gestes mentaux requis par l’apprentissage visé.

Etre en projet de faire vivre le but (ce qui est à acquérir) et les moyens de l’atteindre (les opérations nécessaires à cette acquisition), c’est véritablement poser un acte mental. Il s’agit donc de favoriser une mise en disponibilité de sa conscience personnelle, afin d’être en relation de sens avec le message pédagogique. D’où l’importance de ce concept de projet de sens.

Certains sujets procèdent spontanément à ce travail mental préalable, d’autres n’y ont pas recours. Ce n’est pas une question d’aptitude, car cette situation de projet de sens peut être décrite et communiquée à l’élève : comment s’y prend-il spontanément ? Quels renseignements peut-on lui donner sur ce qu’il peut faire, pour l’aider dans sa manière mentale d’opérer ? Dans cette perspective, il convient de rompre avec un certain discours « aristocratique ». De aristos, qui signifie le meilleur, l’aristocratie se définit par « le pouvoir des meilleurs »… A cela, nous opposons un discours démocratique : « Démocratiser la culture, c’est rendre aux hommes le feu du sens que l’intelligentsia s’ingénie par ses prestiges, à lui dérober… »[11]. Une démocratisation de l’intelligence consiste à faire en sorte que le sujet apprenant devienne l’acteur de son développement cognitif, qu’il devienne « son propre pédagogue ». Cela implique qu’il connaisse ses habitudes de sens. D’où le rôle du pédagogue, qui est de renseigner le sujet sur les structures de projets de sens qu’il a à mettre en œuvre. Cette invitation nous conduit à examiner une autre question, également fondamentale si on la relie à un point de vue personnaliste.

La promotion de la liberté et de l’autonomie

La volonté de décrire l’activité de la conscience est sous-tendue par le projet de dégager des significations, de comprendre le rapport à la connaissance en se plaçant du point de vue de l’intériorité du sujet connaissant. En ce sens, la Gestion mentale nous invite à toute une réforme intérieure : penser par soi-même, par l’évocation. Plutôt que d’aborder le problème du dehors, l’analyse de la Gestion mentale préconise l’étude du dedans et se situe, de fait et résolument, sur le terrain de la conscience apprenante dans sa relation à l’objet didactique.

Dès lors que les conditions de la manifestation des aptitudes sont à la portée de l’homme par l’étude des actes de connaissance performants et l’identification des habitudes mentales qui leur sont sous-jacentes, la pédagogie de La Garanderie ouvre à la découverte d’un savoir sur le monde mental. En cherchant à découvrir avec les apprenants les moyens mentaux de l’intuition du sens et de l’intelligibilité des objets de savoirs, en leur permettant de s’approprier (ou de se réapproprier) leur pouvoir de sens, on les met, de fait, sur la voie de conquérir une certaine forme de liberté pédagogique. Au-delà de l’importance concédée aux vécus de conscience, pris comme tels, dans leur vérité de témoignage, la Gestion mentale repose sur la volonté de libérer pédagogiquement les apprenants en leur offrant, par la connaissance des structures de projet de sens et des moyens de les mettre en jeu, la maîtrise de leur activité, et la liberté « efficace » de leurs actions. La Garanderie souligne bien la valeur qu’il accorde à ce concept de liberté lorsqu’il reprend en incipit de son ouvrage Comprendre et imaginer (1987), une réflexion tirée du Journal de l’abbé Mugnier : « Je crois que l’avenir de l’humanité sera la conquête définitive de la liberté intérieure. »[12].

Certes, et nous touchons là aux limites de toute proposition pédagogique, les élèves peuvent s’y refuser et résister à la sollicitation qui leur est adressée. La liberté est l’affaire du sujet. Elle ne se décrète pas. Cette nuance est capitale, car il y aurait un paradoxe à imposer la liberté pédagogique de l’élève. Celle-ci échappe par définition au pouvoir du pédagogue quels que soient la générosité et le bien fondé de ses intentions. Celui-ci se doit d’assumer cette part d’incertitude et d’aléatoire qui s’attache à toute situation pédagogique. S’il peut « la penser » par une analyse contextualisée de ce qui pose problème ou de ce qui fait obstacle, il n’a pas prise sur elle. Car la liberté de l’apprenant c’est aussi… de ne pas apprendre, même si l’on peut déplorer cette attitude. En outre, le respect de la liberté de l’élève et l’acceptation de son refus d’entrer dans la démarche qui lui est proposée prémunissent la pédagogie de la Gestion mentale d’une tentation « applicationniste » à laquelle certains zélateurs se sont parfois laissé aller et dont le caractère totalisant, sinon totalitaire, nous apparaît mortifère à l’endroit de l’approche elle-même et contradictoire avec l’éthique qu’elle revendique.

Il reste que, si cette liberté est acquise dans l’action pédagogique, elle constitue nécessairement un pas vers l’autonomie de la personne. Autonomie vient de nomos, loi et auto, soi-même… Etre autonome, c’est se donner la loi à soi-même. Dès lors, pour qu’il découvre l’autonomie, le sujet doit être libéré de la transcendance du savoir (on confronte l’élève à un savoir qui lui est extérieur sans lui enseigner les moyens de l’acquérir), et de celle du don (on présuppose chez lui des capacités naturelles ou innées).

L’autonomisation du sujet est également une volonté et une valeur centrale de toute l’approche théorique et pratique de la Gestion mentale. Par la maîtrise de l’intelligibilité intrinsèque de leurs démarches mentales et de la structure opératoire des actes de connaissance, les apprenants peuvent parvenir à acquérir cette autonomie essentielle à l’apprentissage dont l’enjeu est décisif dans une société où, comme nous l’avons dit plus haut, le savoir évolue, se complexifie sans cesse et requiert par conséquent une nécessaire et constante adaptabilité. Une des finalités essentielles de la pédagogie de la Gestion mentale consiste donc à rendre les apprenants « pédagogues d’eux-mêmes » grâce à la communication des moyens d’apprendre et aussi de l’entraide (La Garanderie, 1994), mais sous réserve d’un effort consenti et d’une coopération suffisante, ce qui, encore une fois, n’est jamais complètement garanti.

2.    Les implications au niveau de la pratique pédagogique

Les pratiques inspirées par la Gestion mentale découlent nécessairement de ses fondements éthiques tout autant que de ses fondements épistémologiques. A la question « Qu’est-ce que l’homme a à faire comme actes mentaux pour maîtriser le sens des êtres et des choses qui lui sont donnés à percevoir ? », La Garanderie répond que les fonctions cognitives procèdent d’une structure de projet de sens dont tout être humain peut prendre conscience. Pédagogiquement, cela revient à dire que la réussite scolaire dépend d’habitudes mentales parfois insoupçonnées, dont il est pratiquement toujours possible de s’assurer la maîtrise. Pour expliquer le rôle de cette prise de conscience dans la pédagogie et la théorie de la Gestion mentale, Chantal Evano (1996, 1999) souligne que tout le sens de la pratique sous-jacente à la théorie de la Gestion mentale réside dans la réhabilitation de sujets conscients essayant de connaître les moyens de l’intelligibilité. Cette insertion particulière dans le monde mental a d’ailleurs précédemment fait dire à Guy Le Bouëdec que la Gestion mentale est « …une sorte de théorie de l’action pédagogique portant sur les processus cognitifs conscients ou conscientisables, qui fait fond sur le potentiel intrinsèque de la conscience pour l’attribution du sens, que celui-ci soit sens de compréhension, sens de mémorisation, sens de création, etc., et que le sujet met en œuvre par le biais d’habitudes évocatives. »[13].

Ainsi, les pratiques qui en découlent ont d’abord le souci d’élaborer une pédagogie qui renvoie les apprenants à eux-mêmes, par le recours à l’introspection. Elles visent ensuite à mettre en place les moyens d’une pédagogie de la différenciation selon laquelle les apprenants doivent être respectés dans leur singularité afin de devenir acteurs de sens. Enfin, c’est le souci d’élaborer une pédagogie du sens par le recours à l’évocation mentale, à distance de toute forme de pédagogie du conditionnement ou de la maîtrise, qui guide l’ensemble de la démarche pratique propre à la Gestion mentale.

Une pédagogie qui renvoie les apprenants à eux-mêmes

Dans la Critique de la raison pédagogique (1997), La Garanderie souligne que Socrate a été le premier à poser les principes d’une pédagogie du sens. Considérant que le sens ne peut se transmettre et qu’il doit nécessairement faire l’objet d’une conquête personnelle, l’action de Socrate auprès de ses disciples est orientée par une visée fondamentale : les renvoyer à eux-mêmes afin qu’ils puissent justifier leur conquête du sens.

Ainsi, par l’introspection, dont la pratique entretient une certaine filiation avec les dialogues socratiques, les apprenants sont invités à rencontrer les moyens de leur conquête du sens. Cette introspection cherche à atteindre et à décrire les structures de projet de sens. Elle cherche à identifier chez un sujet concret, et avec lui, des conditions mentales d’attribution du sens. Rappelons que l’introspection est une interrogation directe du sujet, visant à cerner avec précision son mode de fonctionnement mental dans une tâche, c’est-à-dire à décrire les opérations de sa pensée à partir de la conscience propre qu’il en a (La Garanderie, 1989). Il s’agit d’un choix méthodologique essentiel qui donne à l’action pédagogique toute sa spécificité et l’inscrit résolument dans une rencontre interpersonnelle.

Pour placer l’enquête introspective au service de la pédagogie, La Garanderie a développé ce qu’il a appelé le dialogue pédagogique. Une des premières définitions qu’il en donne dans son ouvrage éponyme est la suivante : « Le dialogue pédagogique a pour but de rendre consciente, tant pour l’élève que pour l’enseignant, la réalité mentale qui constitue le domaine de la pédagogie implicite… Faire émerger au niveau de la conscience les habitudes évocatives constituera la pierre de base du dialogue pédagogique. »[14]. Plus récemment, l’auteur précise : « Le dialogue pédagogique a pour objet la prise de conscience par l’élève des moyens qu’il emploie ou qu’il pourrait mettre en œuvre dans les tâches d’apprentissage, d’acquisitions et de développements de connaissance. Quand nous parlons de moyens…, nous ne prenons en compte que ceux de la pensée en travail. Pour dire autrement : les actes de l’activité cognitive pris intrinsèquement comme tels dans leur exercice même. L’échange entre l’élève, les élèves et l’enseignant, le formateur, le spécialiste du dialogue pédagogique, se fait donc en vue de faire apparaître ces moyens, disons, mentaux, utilisés par ces élèves, ces « apprenants », lorsqu’ils sont aux prises avec des situations d’apprentissage, d’acquisition ou de développements de connaissance… Le dialogue pédagogique n’est pas, en effet, enfermé dans le cadre des situations scolaires, il s’étend à toutes les situations de vie où l’activité de connaissance s’exerce spontanément… »[15].

Outil d’accompagnement et de communication, le dialogue pédagogique propose donc une rencontre qui a exclusivement pour objet les procédures mentales mises en jeu pour une tâche donnée. N’entre pas dans le champ de compétence du dialogue l’analyse des causes psychiques, psychosociales ou familiales qui peuvent affecter l’apprentissage. La Garanderie insiste particulièrement sur ce point. Le dialogue avec l’élève a une finalité proprement pédagogique, selon une approche cognitive, au sens large du terme. Ainsi qu’il l’annonce clairement pour bien en marquer la spécificité : « Le dialogue affectif, moral, psychologique, socio-familial, l’enseignement magistral n’épuisent pas les ressources pédagogiques de l’enseignant. »[16]. Et un peu plus loin : « Nous militons pour la reconnaissance d’un dialogue pédagogique, dont nous avons expérimenté l’efficacité puisqu’il est source de responsabilité pédagogique et de succès scolaire. »[17]

Par la pratique de ce dialogue, les apprenants sont invités à s’engager dans la recherche et la découverte de leur fonctionnement mental. Les moyens mentaux qu’ils possèdent pour investir l’apprentissage émergent à leur conscience, tout comme ils deviennent objets de connaissance pour la personne qui les accompagne dans cette découverte (enseignants, éducateurs, parents ou chercheurs).

De fait, et selon l’objectif qui le sous-tend, le dialogue pédagogique peut revêtir différentes modalités, individuelles ou collectives. Dans le domaine de l’éducation scolaire, il peut consister en un questionnement qui vise à identifier les structures mentales mises en jeu lors d’une tâche, afin d’esquisser le mode de fonctionnement d’un apprenant et l’aider à en prendre conscience. Mais, dans le prolongement de cette première investigation, et comme le suggèrent les définitions précédentes, il a également une visée prescriptive (en suggérant des moyens nouveaux) et peut aussi servir d’outil de remédiation lorsqu’un obstacle ou une difficulté se présente. Ainsi : « L’esprit de la méthode du dialogue pédagogique doit être imprégné par le souci de renseigner l’élève afin de le rendre apte à gérer un capital pédagogique composé d’habitudes évocatives et d’un matériel opératoire (attention, mémoire, réflexion, imagination) qui est à sa disposition et dont on lui précisera le bon usage. »[18].

C’est d’abord et avant tout à partir d’une tâche, d’une activité d’apprentissage ou de connaissance, que ce travail de recherche et de découverte peut être engagé. Au cours du dialogue, il importe de s’assurer que la recherche porte bien sur le travail mental (ce qui se passe dans la tête de l’élève) et non seulement sur l’activité perceptive ou l’action qu’il effectue en présence de l’objet. Pour cela, il est préconisé de placer les apprenants sur le terrain des évocations et de les mettre en situation de projet de sens par rapport au dialogue lui-même. Invités à éprouver leur pouvoir d’évocation, ils doivent être activement impliqués dans la recherche de sens, en un mot : être acteurs de sens.

Du côté du pédagogue, des conditions sont requises pour atteindre cet objectif : un souci constant du respect des différences et une volonté de rencontrer l’autre dans sa singularité mentale, même si elle diffère de sa propre manière d’être. Sont également utilisées les techniques rogériennes d’écoute active, de reformulation et de clarification. Si l’auto-observation qu’implique le recours à l’introspection ou la mise en mot de son propre fonctionnement s’avèrent difficiles pour certains sujets, des hypothèses peuvent être proposées, élaborées à partir du référentiel théorique de la Gestion mentale, et soumises à l’appréciation de la personne. La reformulation permettant de s’assurer de leur validité et d’inviter l’apprenant à une démarche d’explicitation et d’approfondissement.

Une pédagogie de la différenciation

Ayant identifié les structures mentales mises en œuvre par des apprenants en situation de réussite lors d’opérations cognitives données, La Garanderie propose une pédagogie des moyens d’apprendre dans laquelle les impératifs habituels (« sois attentif, réfléchis, concentre-toi », etc.) sont remplacés par des descriptions opérationnelles de ce qu’il convient de faire mentalement pour répondre à la prescription. Dans les Profils Pédagogiques, il affirme que : « La pédagogie n’est pas un simple art d’instruire autrui, à partir de connaissances personnellement acquises. Elle est fondamentalement la science des processus quasi spontanément employés par les individus humains pour retenir, pour comprendre, pour composer, pour chercher, pour trouver. »[19]. Dans l’optique de la Gestion mentale, la pédagogie balise ainsi le chemin de l’autonomie pour les apprenants. Informés des processus mentaux nécessaires pour gérer une tâche et conscients de leurs propres habitudes mentales, les apprenants ne subissent plus l’enseignement, ils le vivent, nourris qu’ils sont par la motivation de se connaître et de savoir comment connaître[20].

Sur la base des habitudes évocatives rendues conscientes grâce à la pratique du dialogue pédagogique (individuel ou en classe) et en référence aux connaissances acquises sur la vie mentale, le pédagogue est invité à faire des propositions différenciées pour susciter ces habitudes, les enrichir et en développer de nouvelles, susceptibles de mieux correspondre à la structure des différents gestes mentaux requis par l’apprentissage. La prise en compte de la singularité de chacun, compte tenu des projets qu’il met en jeu, et le souci de la diversité des supports et des situations pédagogiques de nature à y répondre, permettent de définir aussi la Gestion mentale comme une pédagogie de la différenciation.

En effet, il existe de multiples façons de s’approprier le sens. C’est en invitant les élèves à découvrir et à déployer leur gestion mentale en situation d’apprentissage, notamment en se donnant des projets d’évocation qu’ils pourront faire vivre mentalement les structures propres aux savoirs qui leurs sont proposés et accéder ainsi à leur intelligibilité. Cette exigence rejoint certaines préoccupations actuelles des Sciences de l’éducation. Face à l’hétérogénéité croissante des élèves et à la diversité reconnue de leurs processus d’apprentissage, la pédagogie s’interroge sur les moyens à mettre en œuvre pour tenir compte à la fois des matières qui leurs sont enseignées et des modalités de fonctionnement qui leurs sont propres. La pédagogie différenciée est une invitation à identifier cette variabilité et à en tenir compte dans l’action didactique. La conception de l’apprentissage s’en trouve renouvelée.

En accord avec Guy Avanzini, et compte tenu des multiples sens induits par le terme de « pédagogie différenciée », nous préférons l’expression de « pédagogie de la différenciation », parce qu’elle est plus univoque, d’une connotation moins « techniciste » et davantage conforme à l’esprit de nos propositions. Dans son article Mérites, obstacles et exigences de la différenciation, l’auteur précise que « …cette locution, « pédagogie différenciée », comporte un caractère éminemment défectueux, dont l’usage risque de couvrir trompeusement une multiplicité d’acceptions. Elle prolonge et renforce à sa façon la confusion qui affecte le terme de pédagogie, lequel, en toute rigueur et à s’en tenir à la définition qu’en donne Durkheim, signifie exclusivement la réflexion sur l’éducation de l’enfant ; mais une dérive fréquente le réduit ou l’assimile à celui de méthode, voire de technique, de pratique, de procédé, c’est-à-dire à ce que désigne proprement la notion de didactique. C’est pourquoi l’expression « pédagogie différenciée » confond deux registres, celui de la doctrine, c’est-à-dire une argumentation relative au bien-fondé de la différenciation, et celui de la pratique de cette dernière. Pour être clair, il faut donc distinguer entre une « pédagogie de la différenciation » qui a pour objet la discussion du bien-fondé de cette pratique, et cette pratique même, c’est-à-dire la « didactique différenciée », qui résulte en une pluralité de procédures d’enseignement et de travail scolaire. Cette distinction n’est pas formelle, car c’est bien sans doute en raison des enjeux d’une didactique différenciée qu’il y a lieu de s’interroger sur l’origine, la pertinence et l’avenir d’une pédagogie de la différenciation. »[21].

Il nous semble que cette pédagogie de la différenciation est en germe dès les premiers ouvrages d’Antoine de la Garanderie. C’est bien la découverte de profils de fonctionnement différenciés qui a marqué ses toutes premières recherches, celles qui l’ont conduit, notamment, à interroger des élèves brillants (des « cracks »), dont les méthodes de travail différaient significativement. Et c’est à partir de ces différences, objectivement attestées, que ses préconisations pédagogiques ont pris tout leur sens et leur bien fondé. A l’instar d’André de Peretti dont on connaît l’influence dans ce champ de recherches et de pratiques, La Garanderie demande aux enseignants de s’ouvrir à « une intelligence de la différence, des différences, dont l’œuvre d’André de Peretti signale avec une pénétration aiguë les richesses et la nécessaire prise en compte si l’on veut jamais fonder une vraie démocratie de l’enseignement. Pour que l’être humain trouve son identité, il faut qu’il soit reconnu dans sa différence. »[22]

Une pédagogie du sens par l’évocation

Enfin, en plus d’être une pédagogie de la rencontre de soi et de l’autre, ainsi qu’une pédagogie du projet, de l’autonomie et de la différenciation, la Gestion mentale se veut également une pédagogie du sens par la promotion de l’évocation. Dans la perspective de l’apprentissage, elle se fonde aussi sur la volonté de proposer des moyens d’enseignement qui permettent de se dégager de la pédagogie du conditionnement à l’intérieur de laquelle prime la dyade stimulus-réponse.

A la pédagogie traditionnelle dans laquelle, bien souvent, cette pédagogie à deux temps est proposée[23], la Gestion mentale propose l’alternative d’une pédagogie à trois temps dans laquelle on considère, entre la perception et l’action, une étape intermédiaire : l’évocation[24]. Cette pédagogie a pour objectif de faire sortir l’apprenant de la « passivité perceptive du récepteur pour aller à l’activité de l’effectueur mental »[25]. Elle s’appuie sur l’idée que pour apprendre et comprendre, il faut absolument que l’être humain fasse exister mentalement l’objet donné à percevoir à l’aide d’évoqués visuels et/ou auditifs-verbaux. Au lieu de penser que l’apprentissage puisse s’effectuer sur l’objet perçu, La Garanderie postule que l’apprentissage ne peut s’effectuer que sur le produit de l’habitude évocative.

Par rapport à la première phase, celle de la présentation du message et du codage perceptif, deux pratiques inhérentes à la pédagogie de la Gestion mentale retiennent l’attention. D’abord, elle préconise que les apprenants soient mis en projet d’évoquer puisque « c’est bien avant de percevoir qu’il convient d’être en situation de « projet », pour à l’avance « jeter devant soi » ce qu’on vise à capter pour soi »[26] ; autrement dit pour, à l’avance, structurer implicitement ou explicitement l’activité intellectuelle à laquelle on va se livrer. Ceci fait, il est aussi recommandé de présenter sous deux modalités l’objet de perception (présentation visuelle et auditive-verbale), ce qui rejoint les propositions d’une pédagogie de la différenciation.

Lorsque vient ensuite la phase de l’évocation, le moment de l’appropriation mentale, la pédagogie de la Gestion mentale préconise de laisser du temps pour évoquer, afin de constituer le sens, selon le fonctionnement mental propre à chaque apprenant. Dans ce temps accordé à la conquête du sens, des pauses pédagogiques sont proposées. Lors de ces pauses, les apprenants sont invités, au moyen du dialogue pédagogique, à partager leur démarche. Grâce à ce travail de verbalisation et de conscientisation, il est par la suite possible d’investir la troisième phase, celle de l’action et de la tâche à réaliser. L’information codée est alors outil d’action et le projet peut s’engager sur la voie de l’utilisation ou de la réutilisation de ce qui a été codé.

Le dialogue pédagogique : rencontre ou médiation ?

Face à l’élève qui apprend, le pédagogue doit se poser deux questions essentielles : qu’en est-il du sens pour celui qui apprend et par quel chemin peut-il s’ouvrir à la connaissance ? Sans s’y opposer (comme nous l’avons vue précédemment) cette exigence n’appelle pas nécessairement une méthode, au sens d’une démarche didactique organisée et outillée techniquement en vue d’obtenir un résultat. Elle traduit plus fondamentalement une attitude qui, d’une certaine manière, remet en cause la position traditionnelle de l’enseignant. Cette attitude n’est pas sans évoquer celle qui est à l’œuvre dans la relation d’aide inspirée de l’expérience thérapeutique et éducative de Carl Rogers (1968, 1970, 1973). Dans Le développement de la personne, Rogers définit ainsi la relation d’aide : « Une relation dans laquelle l’un au moins des deux protagonistes cherche à favoriser chez l’autre la croissance, le développement, la maturité, un meilleur fonctionnement et une plus grande capacité d’affronter la vie… », ou encore : « …une situation dans laquelle l’un des participants cherche à favoriser […] une appréciation plus grande des ressources internes de l’individu ainsi qu’une plus grande possibilité d’expression et un meilleur usage fonctionnel de ces ressources. »[27]

Plutôt que d’exercer un pouvoir sur l’élève, pouvoir que lui confère son propre savoir ou savoir-faire, l’enseignant choisit de « s’effacer » pour permettre à l’élève d’identifier ses propres ressources et de faire advenir en lui le sens de ce qui est à apprendre (« à prendre pour soi… »). Certes, il ne s’agit pas là d’une « non-directivité molle ». Averti des structures de la connaissance et des lois de la vie mentale, l’enseignant est invité à guider l’élève dans sa rencontre avec le sens, car nous avons montré l’étroite solidarité entre le dialogue pédagogique et le questionnement introspectif. Dans cette perspective, et en référence aux travaux qui privilégient ce concept[28], l’éducateur occupe bien une position de médiateur : d’une part, il permet ou favorise la révélation du sujet à lui-même, par son questionnement, ou les reformulations de ce qu’il comprend du fonctionnement de son élève ; d’autre part, il ouvre un chemin par les propositions qu’il est amené à lui faire, en vue d’une meilleure effectivité mentale, d’un usage plus fonctionnel de ses ressources. En ce sens, il conviendrait de prendre le terme de méthode selon son origine étymologique, c’est-à-dire : methodos qui invite au chemin (odos).

Pour Jean-Paul Michot, le terme de médiation semble convenir à la démarche du dialogue pédagogique, bien qu’il ne soit pas explicitement utilisé par son auteur. Ainsi, la Gestion mentale pourrait être considérée comme une « pédagogie de la médiation mentale » : « Cet acte de médiation par le « dialogue pédagogique » est fondamental dans la démarche de la Gestion mentale. L’adulte médiateur permet en effet au sujet, en situation de tâche mentale, de se rendre explicites les structures mentales nécessitées par son accomplissement, de donner du sens à son projet, de l’enrichir en le modifiant et, par-là, de se remettre en situation de réussite (donc de remotivation). »[29]

Mais cette médiation méthodologique nous apparaît provisoire et prend un sens initiatique. Ainsi que le soulignait, dans son titre, le colloque d’Angers qui s’est tenu en 1989, la Gestion mentale est « voie vers l’autonomie ». Comme nous l’avons dit précédemment, sa finalité ultime est que l’élève devienne son propre pédagogue à partir du moment où il accède à l’intelligence de ses moyens et où lui est offerte la possibilité d’en user. « La libération de la vie mentale grâce à la connaissance que l’on en acquiert est la condition indiscutable de la liberté pédagogique et de la promotion des responsabilités de l’élève. Le sentiment que le progrès dépend de soi engendre la volonté de construire son succès. »[30]. Ici également, cette citation résonne particulièrement du côté d’une tendance personnaliste.

En outre, on peut se demander si le présupposé phénoménologique de la Gestion mentale s’accorde en tout point avec l’idée d’une médiation, au sens d’une interposition nécessaire et plus ou moins instrumentalisée d’un tiers dans le rapport du sujet à la connaissance. Il semble au contraire que la phénoménologie pense la rencontre de l’homme avec le monde selon un rapport direct. C’est parce qu’il est directement confronté au sens des êtres et des choses que l’homme advient à lui-même. D’où l’importance du concept d’intentionnalité qui « marque l’instant où la conscience éprouve le monde comme ce qui n’est pas elle, et pourtant comme ce qui lui permet de se structurer et de se laisser habiter par le sens. »[31]. Sur un plan philosophique, il y a donc matière à débat. Cette prise de position est-elle en tout point recevable lorsqu’on fait œuvre de pédagogie ? N’y-a-t-il pas quelques nuances à introduire lorsqu’on aborde le registre praxéologique de la Gestion mentale ? Dans le champ nouveau de « l’éducabilité cognitive de la personne » où se développent depuis quelques années, sous l’impulsion du Professeur Feuerstein, des recherches prometteuses, il y a lieu de positionner davantage et plus clairement l’approche d’Antoine de La Garanderie au regard des pédagogies de la médiation et, par là-même, le rôle et la place qu’elle assigne à l’éducateur dans le rapport à la connaissance.

Si l’on revient au principe d’éducabilité tel que nous l’avons énoncé plus haut à propos de la Gestion mentale, et à l’appui de la citation de Sylvie Murzeau, il est clair que l’acte de médiation lui est intimement associé. Ce qui est visé dans cette pédagogie, c’est bien « l’actualisation de nouvelles modalités de fonctionnement de la structure cognitive. ». Or, ce développement dépend nécessairement et de fait, de l’intervention éducative. Supposée présente en puissance chez tout homme, l’intelligence ne peut l’être en acte que si un tiers la suscite et en accompagne la manifestation. En ce sens, et même si des nuances sémantiques sont à considérer dans l’emploi qui est fait de ce concept dans les approches relevant de l’éducabilité cognitive, la médiation de l’autre est une condition sine qua non de l’éducabilité de la personne lors de la relation que l’on établit avec elle. (Gaté, 2001, 2002).

Dans son ouvrage Penser et agir l’éducation (1992), Charles Hadji développe l’idée que la conception de la médiation interroge le modèle de la transmission des savoirs, dans la mesure où le point de vue interactionniste y est privilégié. En d’autres termes, et toujours selon ce même auteur, nous assistons à la naissance du « modèle de l’émergence », où « apprendre ne consiste ni à empiler des connaissances dans un espace vide au départ, ni à troquer de l’ignorance contre de la connaissance, mais à complexifier une structure cognitive donnée, et qui est toujours le produit de structures initiales et de l’action déstabilisatrice de l’environnement sur celles-ci… »[32]. Si l’apprentissage résulte d’une démarche singulière de rencontre avec le monde, il n’en est pas moins vrai que l’émergence « implique une double médiation, (celle) du discours d’autrui : langage, connaissances existantes, culture au sens ethnographique, (et celle) d’un environnement suffisamment bruyant pour perturber le calme fonctionnement de la structure cognitive existante, mais cependant pas assourdissant au point d’interdire la résolution « majorante » de la crise ainsi déclenchée. »[33].

En l’occurrence, le sens de la médiation correspond à ce mouvement de passage par l’autre pour advenir à soi. Dans le cadre du dialogue pédagogique, deux postures sont à envisager : une posture descriptive, conforme à la méthode phénoménologique, et une posture prescriptive inévitablement requise par toute démarche pédagogique. Selon la première, le médiateur favoriserait par son écoute et son accompagnement une actualisation du sujet qui se fait sur le mode de l’émergence. Par sa technique de communication, il serait bien cet intermédiaire qui « perturbe le calme fonctionnement » en faisant verbaliser l’apprenant sur la manière dont il procède pour s’approprier le savoir, en lui faisant décrire sa démarche, qui devient dès lors objet de médiation. Il resterait à l’écoute d’une intériorité conscientielle par l’accueil du discours du sujet, sans troubler sa verbalisation par un apport de connaissances extérieures. En ce sens, il assurerait une forme de médiation permettant le passage de l’apprenant implicite à l’apprenant explicite.

Selon l’analyse de Guy Le Bouëdec (1998) le dialogue pédagogique pourrait donc s’inscrire, de prime abord, beaucoup plus nettement dans une démarche d’accompagnement, au sens premier de cheminer « à côté », c’est-à-dire sans préjuger d’un terme qui serait fixé d’avance ou d’une direction préalablement tracée. En ce sens il rejoindrait, dans l’esprit, cette affirmation du poète : « Marcheur ce sont tes traces ce chemin, et rien de plus. Marcheur, il n’y a pas de chemin, le chemin se construit en marchant… »[34]. En dialogue pédagogique, le chemin est à faire ensemble. Il suffit de s’ouvrir à « l’intuition donatrice de sens ». La pédagogie des gestes mentaux se veut ainsi une « pédagogie eidétique » par le dévoilement et la mise à jour des structures de projet de sens qui sous-tendent les actes de connaissance. La dimension de la rencontre avec l’autre y est manifeste et, en cela la situation paraît beaucoup plus « égalitaire » que dans une situation d’enseignement traditionnel. Comme le déclare Antoine de La Garanderie : « Dans le dialogue pédagogique, nous avons affaire, en principe, à deux ignorances de départ : l’apprenant ne sait pas comment s’y prendre pour apprendre, le compétent en dialogue pédagogique ne sait pas comment l’apprenant s’y prend pour apprendre. Le compétent en dialogue pédagogique veut apprendre comment s’y prend l’apprenant et il ne peut l’apprendre que si l’apprenant le lui apprend. Il faut que l’apprenant l’apprenne avant lui pour le lui faire connaître. C’est là le contraire de la situation pédagogique habituelle : l’enseignant sait avant l’apprenant. Dans le dialogue pédagogique, l’apprenant sait avant le compétent. »[35].

Mais le dialogue pédagogique se construit aussi autour de propositions d’élucidations, qui sont des apports d’extériorité sur une manière possible de devenir autre et dont l’apprenant peut éventuellement tirer profit. Le savoir sur le fonctionnement mental, tel qu’il a été défini par Antoine de La Garanderie fait ainsi force de propositions, même si celles-ci conservent toujours un statut d’hypothèses qui demandent vérification et qui sont appelées à être confirmées dans la rencontre avec la réalité de la personne. De ce point de vue, le dialogueur en Gestion mentale renseigne aussi le sujet sur ce qu’il pourrait (devrait ?) faire. Parce qu’il possède une connaissance théorique des actes de connaissance qui légitime son rôle, il est en mesure non seulement de poser les bonnes questions pour aider son interlocuteur à découvrir les procédures qu’il utilise pour connaître, mais également de lui faire découvrir des procédures insoupçonnées dont il pourrait profiter. Certes, et en accord avec cet idéal de la rencontre, ces procédures nouvelles peuvent apparaître inédites et viennent enrichir la connaissance de la vie mentale (qui n’est jamais exhaustive), et que le dialogueur découvre également comme des possibles pour lui-même…

Mais il n’en est pas moins porteur d’objets de culture, de savoir à partager, posés en en extériorité par rapport au sujet. Il y a alors médiation entre la connaissance et l’apprenant. A la posture d’accompagnement s’associe une posture de guidage. Nous ne sommes pas dans une pure description du vécu intérieur, car la finalité est bien de permettre au sujet de s’approprier des objets culturels, en saisissant les modalités de son propre fonctionnement, mais aussi en découvrant et en expérimentant des moyens nouveaux. Une telle médiation se déploie dans un environnement organisé intentionnellement qui vise la mise en place de la fonctionnalité de l’appareil cognitif et de fait, de l’appareil psychique tout entier, afin que la personne s’approprie une connaissance.

Conclusion

Ainsi, la promotion d’une éthique du connaître requiert une méthodologie à mettre en œuvre sur son versant praxéologique. Une relation pédagogique repose autant, sinon plus, sur un savoir-être que sur un savoir-faire. Ce savoir-être s’articule autour de cinq principes :

1. Le pédagogue n’est pas « une conscience pure ». Il n’est pas « en position haute ». Il doit faire preuve d’humilité car l’apprenant lui apprend aussi quelque chose.

2. Le pédagogue s’efforce d’être authentique au sens rogérien du terme.

3. Le respect de l’authenticité d’autrui passe par la considération positive de la personne de l’élève. Ainsi le pédagogue s’abstient de tout discours moralisateur pour se mettre à l’écoute du sens que l’apprenant donne à son acte, et être attentif au sens de ses erreurs.

4. Le pédagogue adopte et assume l’attitude empathique qui consiste à « être en l’autre », en dehors de toute relation fusionnelle.

5. Le pédagogue doit enfin permettre à son interlocuteur d’accéder au sens même du dialogue qu’il engage avec lui.

Ces cinq principes constituent autant des règles méthodologiques que des finalités éthiques. Dans la perspective de la Gestion mentale, qui désormais s’inscrit plus nettement dans son orientation personnaliste, ils se ramènent à un principe fédérateur : reconnaître l’autre dans son pouvoir être et dans son pouvoir de sens.

A terme, le pédagogue consent à s’effacer…

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* Professeur à l’Institut des Sciences de la communication et de l’éducation d’Angers (ISCEA) de l’Université catholique de l’Ouest (PRES-LUNAM).

[1] Avanzini, G., Mougniotte, A., Penser la philosophie de l’éducation. Pourquoi ? Pour qui ?, Lyon, Chronique sociale, 2012, p. 122.

[2] La Garanderie, A. de, Comprendre les chemins de la connaissance. Une pédagogie du sens, Lyon, Chronique sociale, 2002, chap. 6.

[3] La Garanderie, A. de, Les profils pédagogiques, Le Centurion, 1980, p. 184.

[4] La Garanderie, A. de, Les grands projets de nos petits, Paris, Bayard Editions, 2001.

[5] La Garanderie, A. de, Critique de la raison pédagogique, Paris, Nathan, 1997, p. 307.

[6] Avanzini, A., « Gestion mentale et autres approches pédagogiques », in Gestion mentale et recherche de sens, actes du colloque international de Gestion mentale, Paris, Nathan (pédagogie), 1996, p. 66.

[7] En témoigne leur échange célèbre qui inaugura le colloque organisé à l’université de Lyon 2 en 1991, à l’occasion de la commémoration du 80ème anniversaire de la mort d’Alfred Binet.

[8] Murzeau, S., « Médiation pédagogique et éducation intellectuelle. La perspective de Reuven Feuerstein », in De l’éducation intellectuelle. Héritage et actualité d’un concept, sous la dir. de J.P. Gaté, Paris, L’Harmattan, 2000, p. 108.

[9] La Garanderie, A. de, Plaisir de connaître, bonheur d’être, Lyon, Chronique sociale, 2004, 2ème édition 2013.

[10] La Garanderie, A. de, Pédagogie des moyens d’apprendre, Paris, Le Centurion, 1982, p. 120.

[11] La Garanderie, A. de, Apprendre sans peur, Lyon, Chronique sociale, 1999, p. 67.

[12] Journal de l’abbé Mugnier, Mercure de France, 1985, p. 293.

[13] Le Bouëdec, G., « La recherche en gestion mentale », in La Gestion mentale : voie vers l’autonomie, actes du colloque d’Angers, Revue de Gestion Mentale, Le Centurion, 1991, n°1, p.79.

 

[14] La Garanderie, A. de, Le dialogue pédagogique avec l’élève, Paris, Le Centurion, 1984, p. 102.

[15] La Garanderie, A. de, « Objet, finalité et spécificités méthodologiques dans le dialogue pédagogique », in Gaté, J.-P., Pratiquer le dialogue pédagogique à l’Université, Lyon, Chronique sociale, 2012, p.87.

[16] La Garanderie, A. de, 1984, p. 97.

[17] La Garanderie, A. de, 1984, p. 98.

[18] La Garanderie, A. de, 1984, p. 113.

[19] La Garanderie, A. de, 1980, p. 99.

[20] On remarquera au passage que la praxéologie de la Gestion mentale est indissociable de son éthique (voir supra).

[21] Avanzini, G., « Mérites, obstacles et exigences de la différenciation », Bulletin Binet-Simon, n° 617-618, 1988, p. 4.

[22] La Garanderie, A. de, Comprendre et imaginer, Paris, Le Centurion, 1987, p. 174.

[23] 1er temps : perception – 2ème temps : action

[24] 1er temps : perception – 2ème temps : évocation – 3ème temps : restitution/action.

[25] Chich, J.-P., Jacquet, M., Mériaux, M., Verneyre, N., Pratique pédagogique de la Gestion mentale, Paris, Retz, 1991, p. 11.

[26] La Garanderie, A. de, op. cit., 1987, p. 22.

[27] Rogers, C., Le développement de la personne, Paris, Dunod, 1968, p. 29.

[28] Voir en particulier le collectif : Pédagogies de la médiation. Autour du P.E.I. Programme d’Enrichissement Instrumental du Professeur Reuven Feuerstein, Lyon, Chronique Sociale, 1990. (Suite aux Rencontres Internationales de l’Educabilité permanente, sous le patronage du Secrétariat d’Etat à la Formation Professionnelle et organisées sous la direction de Jacques Martin et Gaston Paravy.)

[29] Michot, J.-P., 1990, op. cit., p.87.

[30] La Garanderie, A. de, Tous les enfants peuvent réussir, Paris, Le Centurion, 1988, p. 165.

[31] Artur, T., « Phénoménologie et méthode pédagogique », Gestion mentale. Revue d’études et de pratiques sur la vie mentale n° 3, Bayard-Editions, 1992, p. 58.

[32] Hadji, C., Penser et agir l’éducation. De l’intelligence du développement au développement des intelligences, Paris, E.S.F., 1992, p. 153.

[33] Ibid.

[34] De Antonio Machado, extrait du chant XXIX des Proverbes et chansons, Champs de Castille, 1917, traduit de l’espagnol.

[35] in Gaté, J.-P., 2012, p. 91.