Editions Le Bord de l’Eau, 2022, 217 p.
L’étude collective orchestrée par Jean-Yves Robin porte sur des établissements catholiques d’enseignement sous contrat d’association avec l’État. Elle ne s’ouvre pas simplement à la complexité du métier de chef d’établissement, elle inscrit la parole des sujets au cœur de l’investigation, et permet à celle-ci d’occuper le texte. La souffrance qui est exprimée n’est pas absolutisée mais continûment rapportée à un contexte académique, administratif, organisationnel et managérial par le collectif (les interlocuteurs de terrain, le commanditaire institutionnel et les chercheurs). Ce travail de contextualisation conduit à ne pas individualiser le burn-out ou le bore-out, à ne pas en faire l’affaire du chef d’établissement, l’affaire (culpabilisante) d’un « je » entrepreneur de lui-même, enjoint de trouver en lui les ressources de son dépassement. Tout au long de cette recherche-action-formation, collégiale et sensible, les « nous » organisationnels et managériaux des chefs d’établissement sont interrogés. Mieux, est également questionné le « nous » des interactions vécues, pendant trois ans, par les acteurs de cette aventure. Car il ne s’agit pas seulement d’établir un diagnostic mais de concevoir et mettre en œuvre une démarche susceptible de soulager la souffrance des chefs d’établissement. Démarche proposant à ces derniers et aux chargés de mission de la Direction Diocésaine de l’Enseignement Catholique, des espaces de parole individuels (entretiens cliniques approfondis) mais aussi collectifs d’analyse de la pratique et de l’activité. À la fois « biographisante » et confrontante, elle facilite « un processus de déconstruction-reconstruction au cours duquel les chefs d’établissement finissent par se refaire ». Au sortir de ce bel ouvrage et de l’horizon qu’il offre, je repense à la parole de Bernanos : « La plus haute forme de l’espérance est le désespoir surmonté ».
Bertrand Bergier