Télécharger le fichier en version .pdf
Laurent Gutierrez*
A Gilbert Dufournet
Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le collège de Saint-Martin de France[1] est le théâtre d’expériences pédagogiques originales encadrées par de jeunes professeurs. Menée conjointement à la mise en place dans l’enseignement public des « classes nouvelles », cette initiative témoigne de la volonté du directeur de cet établissement catholique, de participer à cet élan en faveur de la réforme de l’enseignement en France. Directeur de la nouvelle revue Pédagogie, éducation et culture, le père Pierre Faure est attentif à cette tentative de transformation de l’enseignement traditionnel par l’intégration des méthodes actives. Par certains aspects, cette expérience des classes nouvelles rejoint la pédagogie personnalisée et communautaire du père Faure. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles, il accordera de nombreux articles aux méthodes actives dans sa revue en tentant d’en circonscrire les contours. Dans le cadre de cet article, après avoir rappelé les motifs liés à la création de cette expérimentation, nous nous pencherons sur les raisons qui ont conduit le père Maurice Duprey, supérieur de cet établissement catholique, à poursuivre puis à abandonner cet essai d’éducation nouvelle. Puis, nous verrons quelles difficultés cela a posé aux éducateurs chrétiens qui ont porté ce projet malgré l’efficacité de ces moyens d’enseignement peu orthodoxes.
Le projet des « Classes nouvelles » à la Libération
En octobre 1945, la rentrée scolaire est marquée par l’ouverture de près de 180 classes dites « nouvelles » dans l’enseignement public. Pensée dès le mois de mars 1945[2], cette expérience, menée conjointement aux travaux de la commission de réforme de l’enseignement du second degré instruite par Paul Langevin, vise un double impératif : « 1° Satisfaire mieux que par le passé à la fonction d’orientation scolaire qui s’impose de plus en plus à l’enseignement au fur et à mesure que croît le nombre des élèves qui, aspirant à une formation plus poussée que la simple formation primaire, viennent s’inscrire dans les établissements du second degré ; 2° Fournir aux maîtres des conditions de travail meilleures afin qu’ils puissent accomplir leur tâche d’une manière plus conforme aux exigences de vie et de la culture modernes »[3]. Pour atteindre ces objectifs et permettre à tous les enfants de 11 à 14 ans de recevoir un enseignement « capable de solliciter toutes les ressources de l’être individuel et de donner à ces ressources le développement qui leur convient »[4], une nouvelle organisation procédant d’une conception pédagogique basée sur les « méthodes actives » est mise en place.
Sur le plan pratique, l’effectif de ces classes nouvelles est réduit à 25 élèves ; chacune d’entre elles est confiée à une équipe de trois professeurs (deux pour les lettres et un pour les sciences)[5] à laquelle vient s’ajouter, parfois, des maîtres pour les enseignements « spéciaux » (activités artistiques, éducation physique et sportive, travaux manuels, dessin, éducation musicale) ; l’emploi du temps journalier est divisé en deux parties : enseignements généraux (français, mathématiques, instruction morale, langues vivantes, etc.), le matin ; enseignements spéciaux, l’après-midi). Un système d’options permet aussi aux élèves de découvrir par eux-mêmes, durant un semestre, leurs goûts et leurs aptitudes[6]. Il est à noter, enfin, que l’enseignement par « l’étude du milieu » est officialisé à raison de 24h par trimestre afin d’amener l’enfant à mieux connaître l’environnement dans lequel il vit et lui permettre, à terme, de « trouver dans la vie sociale, la fonction à laquelle il est le mieux adapté ».
Les « Classes nouvelles » dans « l’enseignement catholique »[7]
Comme le souligne Bruno Poucet, les propositions de réforme de l’enseignement du second degré émanant de la Commission Langevin vont largement être commentées par les membres de la communauté éducative chrétienne[8], à commencer par le Secrétariat d’études pour la liberté de l’enseignement et la défense de la culture ainsi que par le Centre d’études pédagogiques de Vanves[9]. Outre des articles sur l’avancement des travaux de cette Commission, les deux périodiques de ces organisations, intitulés respectivement Documents pédagogiques et Pédagogie, vont suivre avec beaucoup d’attention les initiatives prises par les établissements catholiques qui, dans le sillage des classes nouvelles officielles, vont se lancer dans cette aventure. Qu’elles correspondent à des essais partiels comme à Saint-Joseph de Poitiers ou dans les Maisons du Sacré-Cœur à Marseille ou, encore, à des tentatives plus poussées, sur la base d’une organisation de la vie de l’établissement sur le mode des équipes, comme dans les collèges de Saint-Joseph de Sarlat et de Saint-Joseph de Reims[10], ces expériences souhaitent rompre avec une pédagogie traditionnelle de type réceptive et la remplacer par des « méthodes actives » qui font appel à la vie sociale des élèves. Il en va de même pour l’essai mené sur la base du Plan Dalton au pensionnat de jeunes filles de Mattaincourt[11], du travail en équipes expérimenté au lycée de Sainte-Hélène de Lyon[12] ou à la tentative d’éducation à la liberté au Collège Saint-Joseph de Bressuire (Deux-Sèvres)[13] à la même époque.
L’essai des classes nouvelles à Saint-Martin de France occupe une place singulière dans les tentatives de réforme de l’enseignement catholique à la Libération. L’intérêt que va lui porter le Centre d’études pédagogiques de Vanves en lui ouvrant ses colonnes atteste du versant expérimental de l’entreprise, pensée originellement dans cet établissement uniquement pour le premier cycle du second degré (6ème et 5ème). Les réflexions et autres bilans soumis aux lecteurs de Pédagogie sont, à ce titre, toujours rédigés selon un mode de justification lié sur des choix pédagogiques adoptés au regard des résultats obtenus par les élèves. L’idée est d’assurer, ainsi, une visibilité des essais menés en connaissance de cause sans omettre les réserves qu’il convient de formuler, le cas échéant, afin de pacifier certaines controverses qui leurs sont liées (liberté immodérée laissée à l’enfant, faiblesse des résultats, aspect ludique trop présent, etc.). Le style adopté par Roger Cordier dans ses articles témoigne de cette prudence avec laquelle il discute des critiques voire des accusations faites à l’endroit de ces pédagogies actives. Dès lors, si l’expérience des classes nouvelles de Saint-Martin de France n’est pas isolée, il n’en reste pas moins qu’elle fait figure d’essai original à l’échelle des établissements de l’enseignement catholique qui, pour la majorité, fonctionne sur les bases d’une pédagogie traditionnelle peu encline à voir se développer ce type de pédagogie. Le choix d’ouvrir des classes de sixièmes nouvelles à la rentrée 1945 procède, cependant, d’une conviction très personnelle que se fait de la pédagogie le supérieur de cet établissement.
Les « classes nouvelles » de Saint-Martin de France
Fondé, en 1929, par des familles de la région de Pontoise et confiée par Mgr Roland-Gosselin[14] aux pères de l’Oratoire, le collège de Saint-Martin acquiert très vite une solide réputation tant pour la qualité de ses enseignements que pour son cadre de vie. Nommé à la direction de cet établissement catholique par Mgr Courcoux[15], le père Maurice Duprey (1893-1963)[16] commence par s’interroger sur l’efficacité du modèle traditionnel de l’enseignement scolaire. Convaincu que l’amélioration du niveau de connaissances des élèves passe par « une amélioration des méthodes d’enseignement »[17], il repense alors l’action du maître et leur collaboration avec les parents d’élèves. Durant les années 1930, il précisera, à plusieurs reprises, sa conception de l’éducation dans les Cahiers de Saint-Martin. Influencé par le modèle de l’école des Roches[18], il alerte régulièrement les membres de la communauté éducative des dangers de la routine, de l’ankylose et de l’indifférence qui peut naître dans une école si on n’y prend pas garde. A ce titre, il profite des éditoriaux du bulletin de l’école pour aborder les méthodes d’enseignement, les sports, les travaux manuels, la formation artistique, les mouvements de jeunesse, etc. témoignant de son ouverture sur le monde pédagogique qui l’entoure.
Le choix du père Duprey d’ouvrir deux sections de Sixièmes nouvelles à Saint-Martin de France, en 1945, s’inscrit dans une double logique. Participer à une réflexion et une expérimentation des méthodes pédagogiques dites « actives », d’une part, et travailler à la démonstration de la qualité de l’enseignement catholique, d’autre part. Car il s’agit aussi, dans le cas où ces méthodes fonctionneraient, que les membres de la communauté éducative chrétienne ne soient pas « à la remorque » de l’enseignement public. Des différences existent cependant entre les deux réalisations. Selon la volonté et les traditions des familles, les enfants scolarisés à Saint-Martin de France doivent impérativement accéder au cycle secondaire afin d’obtenir leur baccalauréat[19]. Conscient de cet enjeu, Maurice Duprey se veut pragmatique. La pérennité de ces deux sixièmes nouvelles dépendra de l’obtention d’un niveau de connaissances au moins égal à celui des autres classes dites « traditionnelles ». A cet effet, des évaluations comparées entre toutes les classes de ce niveau d’enseignement sont pensées afin de valider ou non la poursuite de cette expérience[20]. Cette « aventure pédagogique » est d’autant plus ambitieuse lorsque l’on sait que les enseignants de ces classes n’ont bénéficié d’aucune formation. C’est la raison pour laquelle un courrier polycopié est rédigé puis transmis aux parents par le professeur principal de la classe, à la fin de chaque trimestre, afin de les informer et de les associer aux activités de leurs enfants[21].
Principes pédagogiques et orientations éducatives nouvelles
Dès le début, les efforts sont concentrés sur l’éveil des aptitudes à partir d’un temps aménagé durant lequel chaque élève peut, sous le contrôle des maîtres, s’employer, seul ou en équipe, aux activités de son choix. Les observations tirées de ces séquences permet aux enseignants de trouver par quels centres d’intérêts, il est possible de faire communier toutes les disciplines du programme : « C’est la volonté de ne rien enseigner à un enfant avant d’avoir trouvé un point de contact entre ce qu’on propose de lui apprendre et son esprit qui commande toute l’organisation de notre Sixième »[22]. Cet appel à l’activité sur la base de la découverte et de la collaboration « dans la logique vivante d’un mouvement de recherche et de connaissance » constitua la base à partir de laquelle les thèmes d’études furent adoptés avec enthousiasme par les élèves[23]. La démarche suit une logique liée aux besoins qu’ont les élèves de connaître de nouvelles choses ou de se perfectionner dans un domaine afin d’atteindre un nouvel objectif. C’est là, tout le sens de « l’étude exploratoire du milieu » à partir de laquelle il devient possible de mobiliser de nombreuses disciplines enseignées séparément jusque là. C’est à partir de l’une d’entre elles que les élèves du père Cordier abordèrent la question des échelles en géographie[24]. A la suite d’une promenade dans le parc de l’école, un découpage en plusieurs secteurs fut réalisé et confié, chacun, à une équipe qui avait la charge d’y indiquer l’ensemble des éléments recueillis. Pour que cette vue d’ensemble apparaisse cohérente lors du rassemblement de tous les secteurs, les élèves étudièrent ce qu’il convenait de savoir des questions d’orientation, d’angles et d’échelle pour confectionner une carte au 1/1000 de l’école qu’ils étaient, désormais, les seuls à connaître avec tant de précision.
Dans son rapport annuel au père Duprey, Gilbert Dufournet expose également les bénéfices qu’il tira des explorations régionales qu’il conduisit durant l’année scolaire 1947-1948 avec la section de « sixièmes actives »[25] des Pins : « Tout de suite, les résultats obtenus à tous points de vue furent assez encourageants pour les poursuivre et les intensifier. L’an dernier, la Sixième quatre a visité ainsi en équipes tous les villages de la Vallée de la Viosne et ceux de la Vallée de l’Oise de Pontoise à Creil. Chaque village est étudié sous son aspect géographique, historique, économique et démographique. Les contacts avec les agriculteurs, les nombreuses visites d’usines, procurent un indéniable enrichissement culturel et social. Ces randonnées en équipes plus libres déterminent aussi un esprit d’amitié et de responsabilité très solides. Chaque visite de village commence par la visite au Saint-sacrement dans l’Eglise (…). Découvrir. Comprendre. Deux mots qui impliquent un effort plus grand quoique moins visible, peut être, que les mots ‘‘Ecouter’’ et ‘‘apprendre’’ »[26]. Systématiquement, ce travail d’enquête amène les élèves à compléter leur travail à partir des autres disciplines : mathématiques (calcul des proportions et des distances, etc.), dessin (croquis, relevés), français (comptes-rendus d’excursions). Ces explorations régionales font également prendre conscience aux jeunes enseignants, responsables de ces sixièmes nouvelles, que l’étude de la langue française ne peut pas être confinée dans la classe et que la durée respective de chaque discipline doit être ainsi repensée dans le cadre d’une organisation plus souple : « Plus de séances de deux heures où l’on contraint l’enfant à une immobilité contre-nature, où le maître, merveilleusement barricadé de défenses et de sanctions, pérore sur l’assouplissement général. La classe est courte : deux séances d’une heure, coupées d’une détente. Jamais trois heures dans une matinée : la troisième serait perdue. On l’emploie à des activités qui souffrent d’une attention moins exigeante : chant, dessin, jeu scénique. Mais surtout, on s’ingénie à varier l’organisation et le mode des exercices individuels ou par équipes, en concours ou sous forme de contrôle réciproque »[27].
Un bilan en proie aux polémiques et au scepticisme
Cette nouvelle organisation du temps scolaire va générer des inquiétudes et des critiques : « Quelle que soit l’excellence des techniques pédagogiques préconisées et l’opportunité de faire appel à des méthodes actives, il reste qu’il est dangereux de renoncer à établir une hiérarchie entre les enseignements et de mettre sur le même pied toutes les disciplines, sous le prétexte que tout peut servir à tout, qu’un éducateur peut, partant d’une activité quelconque de l’enfant, développer tout son être »[28]. Cette défiance vis-à-vis de cette approche de l’enseignement est fondée sur l’idée selon laquelle elle porterait atteinte à la culture dont l’école doit assurer la transmission : « Si l’on voulait cantonner l’enfant dans les activités d’observation à partir des seuls réalités concrètes, visibles et tangibles, cela se comprendrait. Dès lors que l’on prétend l’initier à la culture, le faire entrer dans le royaume de l’esprit, le paradoxe ne peut être tenu. Toute activité peut être utile, soit. Toutes ne concourent pas de la même façon et avec la même efficacité au développement intellectuel, moral et spirituel de l’enfant »[29]. Dès le mois d’octobre 1945, les Documents Pédagogiques s’interrogeaient sur les fondements théoriques de la conception de l’éducation qui préfigurait à l’expérimentation des classes nouvelles : « Une pédagogie n’est-elle pas toujours le reflet d’une philosophie ? Il semble que les auteurs du programme ne sachent pas très bien à quelle conception philosophique de l’éducation ils veulent rattacher leur pédagogie (…). Quelle conception de l’homme ont-ils devant les yeux en bâtissant cette pédagogie ? Ils se défendent de trop emprunter aux Etats-Unis, ayant peur, sans doute, de conduire notre jeunesse au pragmatisme ; en s’inspirant des centres d’intérêt decrolyens, qui se révèlent trop souvent pour l’esprit des facteurs de dispersion, ne risquent-ils pas d’abandonner nos petits Français aux portes du domaine de la conscience intérieure, aux portes de l’humain ? »[30].
Ce scepticisme explique le soin avec lequel le père Cordier puis, l’un de ses collègues, Antoine Aulagner, répond aux questions dans les articles qu’ils feront paraître dans la revue Pédagogie entre 1946 et 1949[31]. Cette nécessité permanente de se justifier sur les choix et les résultats obtenus à partir des méthodes actives se trouve d’ailleurs probablement à l’origine de la motivation de Roger Cordier de consacrer un ouvrage à cette expérience[32]. A terme, les préjugés auront raison des efforts de ces promoteurs de l’éducation nouvelle dans cet établissement catholique. Préjugés renforcés par des plumes autorisées dans la presse durant cette période qui utiliseront sans vergogne, le crédit qu’ils ont auprès du grand public pour répandre des jugements souvent sommaires et mal informés sur ces classes nouvelles[33]. Ainsi, pour Pierre Audiat qui reconnaît les vertus d’un enseignement attractif basé sur le jeu – reprenant, au passage, de façon ironique, quelques slogans des maisons d’édition des années 1920 telles que « Le latin sans pleurs » ou « le grec sans larmes » – où « la corvée de classe est remplacée par le scoutisme scolaire ; [où] le professeur n’est pas un chef, mais un routier guidant, à peine, les éclaireurs et les louveteaux. (…) » ; les aspects négatifs l’emportent sur les aspects positifs. En effet, selon lui, dans ces classes nouvelles « la discipline flotte, l’effort pénible n’étant ni imposé, ni requis, l’enfant l’ignore ; l’exercice de la mémoire est négligé ; les bases des connaissances futures, telles que la grammaire ou la mathématique [sont acquises] au hasard »[34]. Au-delà de ces articles de presse[35], des rumeurs accompagnent aussi ces essais comme le rapporte Roger Cordier : « (…) je me souviens avoir entendu (…) que les Classes Nouvelles n’étaient pas autre chose qu’une machine de destruction de toute notre culture traditionnelle, et que leur but, soigneusement caché, était d’empêcher les enfants de s’élever jamais jusqu’à l’idée générale »[36].
La fin d’une expérience
La fin des classes nouvelles à Saint-Martin de France va coïncider avec le départ de Maurice Duprey, appelé à la tête de son ordre. Désormais, Supérieur général de l’Oratoire, le Très Révérend Père Duprey ne peut plus superviser cette expérimentation qui lui tient pourtant, très à cœur. Il est alors décidé de mettre un terme à cet essai dont les bons résultats sont pourtant avérés tant sur le plan scolaire que sur celui de l’épanouissement des élèves[37]. C’est sur la base du « témoignage d’un converti »[38] que Roger Cordier publie son article « Fin d’une expérience » en décembre 1949. Il n’y cache pas son amertume devant le choix qui est fait de ne pas poursuivre ces classes nouvelles en seconde : « Il n’y aura pas de Seconde Nouvelle. Il ne nous reste que ces souvenirs doux-amers. On a pris soin de nous démontrer que la mesure était sage, qu’à deux années du baccalauréat, il convenait, en effet, de bachoter. Nos horaires assouplis, les libertés que nous prenions avec certaines tranches des programmes, notre mode de travail, ne sauraient plus s’accommoder des exigences d’un examen où la récitation prenait le pas sur le jugement, où l’abondance des connaissances avait plus haut cours que l’agilité de l’esprit »[39]. Apparaissant comme une tentative originale de transformer les méthodes d’enseignement, l’expérience des classes nouvelles à Saint-Martin de France connaîtra une fin prématurée au regard des impératifs scolaires traditionnels qui reprendront leurs droits, passés les espoirs d’une école nouvelle à la Libération.
* Maître de conférences en Sciences de l’éducation, Université de Rouen. Laboratoire CIVIIC.
[1] Laurent Gutierrez, « Saint-Martin de Pontoise ». In Guy Avanzini (et coll.), Dictionnaire historique de l’éducation chrétienne d’expression française, Paris : Don Bosco/AIRPC, 2010, pp.670-671.
[2] Une note du 16 mars 1945, publiée dans le n°26 du 12 avril 1945 du Bulletin officiel du Ministère de l’Education nationale (p.1639), atteste, par son titre (« Admission en classe de 6ème nouvelle. Répartition des élèves »), des premières directives liées à la mise en place de ces classes nouvelles.
[3] Ministère de l’Education nationale, Les classes nouvelles, Paris : imprimerie nationale, 1950, p.5.
[4] Circulaire du 20 août 1945 émanant du Cabinet du Directeur du Second degré, Gustave Monod.
[5] Cette équipe de professeurs volontaires réunit en « conseil de classe », une fois par semaine, vise à coordonner les enseignements et à confronter les observations faites sur chacun des élèves.
[6] Le latin fait partie de ces options au même titre que l’éducation musicale et de l’éducation plastique, par exemple.
[7] Au moment où ces classes nouvelles sont instituées, il n’existe pas encore de coordination nationale de l’enseignement catholique avec un secrétariat général. Il faudra attendre 1951 pour que celui-ci voit le jour.
[8] Bruno Poucet, « La réception du Plan Langevin-Wallon dans l’enseignement catholique ». In Laurent Gutierrez et Catherine Kounelis (Dir.), Paul Langevin et la réforme de l’enseignement, Grenoble : Pug, 2010, pp.121-135.
[9] D’autres revues par le biais de leurs chroniqueurs comme Georges Bertier dans L’Enseignement chrétien ou Alain de Sauveboeuf dans Educateurs commenteront également les souhaits formulés par cette Commission ainsi que les débuts de ces sixièmes nouvelles dans l’enseignement public.
[10] Sur ces expériences, consulter le n°10 de Pédagogie de décembre 1947.
[11] Agnès Kettela, « Au XXè siècle : des disciples de Pierre Fourier. Origine de l’expérience de la maison de Mattaincourt (1947-1954) », Airap info, n°85, juin 2006, pp.16-20.
[12] Joseph Lacroix, « Le travail en équipes dans un externat », Pédagogie, n°10, décembre 1947, pp.589-591.
[13] Alain de Sauveboeuf, « Une école d’éducation de la Liberté. Le Collège de Saint-Joseph, de Bressuire », Educateurs, n°25, janvier 1950, pp.22-29.
[14] Evêque de Versailles.
[15] Evêque d’Orléans et supérieur général de l’Oratoire.
[16] Joseph Bouley, « Duprey (Père Maurice) ». In Guy Avanzini (et coll.), Dictionnaire historique de l’éducation chrétienne d’expression française, Paris : Don Bosco/AIRPC, 2010, p.214.
[17] Maurice Duprey, « Etudes », Saint-Martin, n°2, avril 1931, p.4.
[18] « Je trouvai à l’école des Roches, l’illumination et la voie ». Maurice Duprey, « L’intuition créatrice ». In Collectif, Maurice Duprey. Prêtre et éducateur de notre temps, Paris : Vinci, 1995, p.35.
[19] Les parents de ces enfants sont soit des diplomates, soit des industriels du Nord, soir d’importants agriculteurs de la région.
[20] L’examen de fin de trimestre était une tradition à Saint-Martin. Les épreuves étaient corrigées par des professeurs d’autres classes. Ainsi, la correction des copies des élèves de 6ème confiées aux professeurs des classes de 4ème donnait lieu à classement global de tous les élèves de 6ème auquel s’ajoutait un classement par classes.
[21] Ces cahiers prendront respectivement les titres de « Feuilles de l’abbaye : Sixième nouvelle » pour la classe du père Roger Cordier (les trois premières sont retranscrits (pp.52-59) dans le n°4 de mars 1946 de la revue Pédagogie) et « Sentiers » pour celle de Gilbert Dufournet que nous remercions d’avoir mis à notre disposition ses archives.
[22] Roger Cordier, « Une sixième nouvelle libre », Educateurs, n°5, septembre-octobre 1946, p.395.
[23] Contrairement à l’enseignement traditionnel basé sur l’ordre des chapitres d’un manuel.
[24] Roger Cordier, « Les sixièmes nouvelles à Saint-Martin de France », Pédagogie, n°10, novembre 1946, p.39.
[25] Nous retrouvons, à plusieurs reprises, l’expression « Classes actives » pour qualifier ces « classes nouvelles ».
[26] Archives privées Gilbert Dufournet. « Cinquième quatre (1950) ». Document dactylographié de 4 pages.
[27] Roger Cordier, « Une sixième nouvelle libre », Educateurs, n°5, septembre-octobre 1946, p.398.
[28] Anonyme, « Les Sixièmes Nouvelles », Pédagogie, n°2, janvier 1946, p.59.
[29] Ibid, pp.59-60.
[30] Anonyme, « Sixièmes nouvelles », Documents pédagogiques, n°28, 3 octobre 1945.
[31] Respectivement dans les numéros 4 de mars 1946 (pp.49-59) ; 10 de novembre 1946 (pp.27-47) ; 9 de novembre 1947 (pp.559-566) ; 10 de décembre 1947 (pp.592-601) et 5 de mai 1949 (pp.259-273).
[32] Roger Cordier, Classes nouvelles, Paris : éditions de l’épi, 1948.
[33] Dans un article intitulé « Pour la rentrée des classes », paru dans Témoignage Chrétien, le 7 octobre 1949, le professeur Albert Béguin se désole, par exemple, à partir d’une considération toute personnelle et arbitraire, de l’absence d’exercices d’analyse logique dans ces classes nouvelles.
[34] Pierre Audiat, « Les ‘‘classes nouvelles’’ », Le Figaro, 16 juillet 1948.
[35] Dans l’article « La montée des classes nouvelles dans l’université », publié le 16 octobre 1948 dans Le Figaro Littéraire, un auteur méprise, sur un ton faussement humoristique, les professeurs des Classes nouvelles du Lycée de Janson de Sailly de Paris qui prétendent, selon lui, « former des couvées de génies pou chaque saison » en leur rappelant les grands intellectuels qui sont sortis de ces classes traditionnelles, tant décriées.
[36] Roger Cordier, « Classes nouvelles. Fin d’une expérience », Pédagogie, n°10, décembre 1949, p.595.
[37] Pour des raisons essentiellement économiques, les classes nouvelles de l’enseignement public prendront fin avec la circulaire du 30 mai 1952 (Bulletin officiel du 5 juin 1952). Sur ce point, voir Antoine Savoye, « Réforme pédagogique, réforme disciplinaire : l’expérience des Classes nouvelles dans l’enseignement du second degré (1945-1952) ». In Renaud D’Enfert et Pierre Kahn (éd.). En attendant la réforme. Disciplines scolaires et politiques éducatives sous la IVè République. Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, pp.51-64.
[38] Roger Cordier, « Bilan de classes nouvelles », Pédagogie, n°9, novembre 1947, p. 560.
[39] Roger Cordier, « Classes nouvelles. Fin d’une expérience », Pédagogie, n°10, décembre 1949, p.593.