Archives de catégorie : Non classé

« Autorité ou autorités ? »[1]

Suggestions certaliennes

Jean-Yves Séradin[2]

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Résumé : Michel de Certeau aide à questionner la crise de l’autorité que vit l’école avec, pour la résoudre, de fréquentes et stériles incantations à revenir à un ordre ancien mythifié. Dans une société sans horizon d’attente, enseigner devient plus compliqué. Michel de Certeau distingue autorité et pouvoir, soulignant que tout passage en force mène à l’échec. Ne serait-ce pas l’autorité qui pose problème ? La recherche d’un consensus pour refonder un système d’autorités crédibles, car le mot ne peut se penser au singulier, est nécessaire.

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Une autorité fragile au service de la cohésion

Bernard Senelle[1]

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Résumé : ces quelques réflexions prennent acte du caractère fragile de l’autorité, surtout si on pense dans le cadre du judéo-christianisme. Cette fragilité peut être performante et faire naître d’autres modes de management en s’inspirant notamment du gouvernement de l’Ordre Dominicain qui a fait ses preuves depuis 800 ans. L’autorité n’est pas que verticale, elle confiée à certains pour un temps donné.

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Crise de l’autorité :  offensive des têtes bien pleines ou résistance des têtes bien faites ?

Francis Marfoglia

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Résumé : Le déclin de la verticalité et l’effondrement de l’autorité constituent une crise sans précédent de la transmission. Mais, s’il y a crise, en quel sens faut-il l’entendre ? Est-ce le peuple qui rejette ses élites ou les élites qui rejettent le peuple ? Révolte du peuple ou révolte des élites ? Depuis la déconstruction, les élites ont pris fait et cause pour la cancel culture qui s’accomplit dans le mouvement woke, elles se sont engouffrées dans le mouvement des réformes sociétales et ont largement trahi la cause des peuples. S’impose alors de penser cette crise de la transmission à partir de la très fructueuse distinction entre têtes bien pleines et têtes bien faites proposée par Montaigne. Cette distinction permet de mettre en exergue les faiblesses constitutives des têtes bien pleines, d’en apporter la preuve avec la réception de l’œuvre de Soljenitsyne par l’élite américaine, puis d’opérer le parallèle avec l’étonnant mépris de l’Occident que ces mêmes élites veulent imposer au monde. Ce dernier point éclaire comment la disparition de l’autorité des élites ne correspond pas à sa contestation par le peuple mais à la revendication de l’autorité de l’intelligence que la sagesse populaire du peuple français a conservée comme un héritage de la philosophie occidentale auquel fort heureusement rien ne peut l’inciter à renoncer.

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Participation aux marches pour le climat en Belgique

Une illustration de la migration de l’autorité chez les jeunes

Geoffrey Legrand[1]

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Résumé : Après avoir donné quelques repères psycho-sociétaux pour mieux comprendre la nouvelle génération, nous illustrerons la migration de l’autorité, de l’extérieur vers l’intérieur, chez les jeunes qui se sont engagés dans les marches pour le climat (Belgique, 2019). Nous analyserons le positionnement des responsables de l’école catholique, des enseignants, des éducateurs et des parents. Puis, avec quelques questionnements d’ordre pédagogique et théologique, nous réfléchirons à la manière dont ces réactions des adultes s’inscrivent dans le cadre d’un rapport hiérarchique bienveillant, plus « horizontal » que « vertical ».

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Les élèves parties prenantes de l’école[*]

Citoyenneté et participation dans la vie scolaire et les apprentissages

Conférence donnée le 15 novembre 2006

François Galichet[†]

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La réflexion que je vais tenter de mener maintenant va essayer de préciser ce que veut dire effectivement « l’élève partie prenante ».

Je partirai de la notion de milieu éducatif.

Cette notion d’élève « partie prenante » implique la mise en relation de trois termes : une axiologie, une anthropologie et un positionnement de l’enseignant.

On peut donc s’interroger, à partir de là, sur ce qu’est qu’un milieu éducatif qui fasse leur place aux élèves, qui les considère comme « partie prenante ». Et cette réflexion sur la notion de milieu éducatif me conduira à proposer une notion que j’appellerai la notion d’intelligence sociale, avec son corollaire : quand on est intelligent on peut l’être plus ou moins, on peut même ne l’être pas du tout ; et donc le contraire de l’intelligence sociale serait ce que je serais tenté d’appeler l’analphabétisme social.

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Des « leaders populaires » contre la crise de l’autorité

Un défi éducatif du pape François

Philippe Franceschetti*

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Résumé : Au fil de ses écrits, nous analyserons un aspect plutôt méconnu de la pensée du pape François : le souci de former des « leaders populaires ». Nous montrerons que cela engage l’éducation chrétienne et que cela fait écho à une certaine crise de l’autorité.  Cette notion de « leaders populaires » fait appel à une l’idée que François se fait du « peuple » et nous amène à préciser sa conception de la prise de responsabilité. C’est donc pour le système éducatif une interpellation forte au sujet de la formation à dispenser aux jeunes dans une relation d’autorité renouvelée, mais aussi de la conception à avoir de la communauté éducative et de la pédagogie à adopter pour parvenir à cet objectif. Dans la crise de l’autorité actuelle, François propose aux éducateurs une démarche pour former à une autre autorité, la démarche d’Emmaüs.

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Sœur Emmanuelle BILLOTEAU
Nicolas Barré : Un chemin de liberté.

Paris, Salvator, 2021, 222p.

Le grand réveil religieux qui a marqué, en France, le XVIIème siècle a suscité, à la fois, des initiatives pastorales d’envergure, notamment l’essor de l’éducation des milieux populaires et la création de congrégations enseignantes, mais aussi un renouveau spirituel très intense, comportant l’essor de conversions engagées par des chrétiens désireux d’assurer leur perfectionnement spirituel. Si Nicolas Barré a intensément participé à l’action scolaire de sa propre congrégation des Minimes, le second chantier lui doit également beaucoup. Il a, en effet, puissamment aidé ce mouvement que nous appellerions volontiers aujourd’hui « d’accompagnement » : il s’agit bien toujours d’éducation, non plus, certes, d’enfants, mais d’adultes à faire grandir spirituellement selon leur propre souhait. Leur volonté étant de répondre à l’appel de Dieu, cela se fera selon des voies appropriées à leur état de vie, à leur culture et à leurs aspirations. Il ne s’agit pas, ici, de se contenter d’une démarche peu exigeante, mais bien d’identifier et de cultiver des voies appropriées à chacun, de façon personnalisée. Comme l’écrit dans sa préface Monseigneur Boulanger, « la vie spirituelle, pour eux, ne s’adresse pas à des anges mais à des êtres humains ». Il s’agit donc, de façon modeste mais résolue, de mettre en place une démarche de formation chrétienne d’adultes. Cela devait aboutir en 1694, c’est-à-dire quelques années après la mort de l’auteur, à la publication de « Maximes pour la direction des âmes » tant pour les « directeurs » que pour les personnes « dirigées ». Il s’agit donc d’instaurer une pratique originale de perfectionnement spirituel. L’on sera à bon droit reconnaissant à Sœur Emmanuelle d’avoir ainsi actualisé une voie de recherche un peu oubliée mais dont les origines et l’histoire méritent d’être connus, et cela à l’occasion du 4ème centenaire de la disparition de Nicolas Barré. Il convient donc d’en féliciter chaleureusement Sœur Emmanuelle.

Guy AVANZINI

 

Axelle BRODIEZ-MOLINO
Des sans-logis aux sans domicile : Le foyer de Notre Dame des sans-abri à Lyon depuis 1950.

Éditions des Presses universitaires de Saint Etienne, 2020, 268 p.

Voici un ouvrage qu’il est malaisé d’affecter à une rubrique scientifique classique. Paru dans la Collection « Sociologie-matières à penser », il relève de plusieurs disciplines ordonnées à l’étude d’un épisode éminent de l’histoire de Lyon : la fondation du foyer Notre Dame des sans-abri ouvert en 1950 par Gabriel Rosset, professeur dans un lycée public et membre fidèle de la Paroisse Universitaire de Lyon.

Plutôt que d’en présenter un résumé, sans doute est-il préférable de distinguer les trois raisons majeures qui font à la fois sa valeur et son intérêt. La première est d’ordre historique : il s’agit d’une étude approfondie et rigoureuse du célèbre « foyer » qui a marqué décisivement l’histoire du Christianisme social à Lyon. Madame Brodiez a minutieusement reconstitué et exposé sa genèse, son ouverture ainsi que son développement. Elle montre l’extraordinaire hétérogénéité de ceux qui y ont cherché et trouvé un accueil et un réconfort.

Mais, surtout, l’horizon s’élargit et l’auteur situe le foyer lyonnais dans le contexte sociologique de l’époque ; elle inventorie avec minutie et de façon souvent novatrice, l’émergence et l’activité des diverses Œuvres, religieuses ou non, mises en place tant par les Églises que par les services officiels pour faire face au phénomène impressionnant de la misère. Elle dresse le tableau des institutions vouées à y remédier, issues notamment de l’influence de l’Abbé Pierre et de l’action du Secours Catholique.

Une troisième raison de la valeur de cet ouvrage, c’est la manière dont, discrètement mais fermement, elle met en lumière et en relief l’anthropologie chrétienne qui témoigne de la volonté d’ouvrir aux sans-logis un avenir qui leur rende possible l’éventualité de retrouver leur autonomie. Le signe délicat mais fort de cette volonté se trouve d’emblée dans le terme de « passager », qui désigne ceux qui sollicitent de venir au Foyer et d’y être reçus : ce mot signifie qu’ils ne sont pas voués à jamais à la marginalité mais que leur avenir demeure ouvert. C’est ce que montre aussi la présence Gabriel Rosset auprès de ces « passagers » pour étudier de façon personnalisée avec eux l’ouverture d’un avenir.

On sera donc particulièrement reconnaissant à madame Brodiez de cette recherche novatrice, qui pose un problème tragique par l’énormité de ses aspects et la complexité des activités qu’elle impose.

Guy AVANZINI

 

Bertrand BERGIER
Retours gagnants. De la sortie sans diplôme au retour diplômant.

Peter Lang, Bruxelles, 2022, 226 p.

Ce livre est à la fois original, bienvenu et opportun. Prenant acte de l’usure de l’École, que manifestent tout particulièrement l’échec scolaire et la décision individuelle de quitter l’institution sans avoir acquis de diplôme, Bertrand Bergier entreprend d’élucider la signification de ce phénomène et étudie les voies d’une remédiation.

A la lecture de cet ouvrage très documenté, nous avons d’abord apprécié sa maîtrise méthodologique, que manifestent particulièrement la finesse de ses analyses comme la clarification du phénomène de l’absentéisme, dont il discrimine les diverses étapes. Celui qui abandonne l’École volontairement et sans diplôme va, certes, jouir d’abord de la liberté ainsi acquise mais il va bientôt éprouver aussi désarroi et ennui. Cette situation déroutante va l’amener à envisager l’éventualité d’une reprise d’étude, en vue de l’obtention d’un diplôme. Mais, ce faisant, il se heurte à toutes sortes de difficultés, susceptibles de ruiner son projet, sauf s’il maintient la volonté de soutenir son effort.

L’observation de ces cas amène à privilégier deux remarques fondamentales pour expliquer ce processus complexe de départ et de retour. Il est clair d’abord que, à travers les modalités les plus complexes, l’élément déterminant de ce mouvement est d’abord d’ordre affectif : ce qui commande l’évolution de l’adolescent dans ses incertitudes et ses changements, c’est d’abord la qualité des relations intra familiales. Comme aux autres moments du développement du sujet, c’est bien toujours ce facteur relationnel qui est premier. Secondement, et plus précisément, l’auteur dégage une hypothèse dont la formulation et l’énoncé justifient la citation intégrale : « plus les jeunes de notre population sont issus de catégories professionnelles modestes, plus les facteurs de décrochage les distinguant de manière significative concernent les registres cognitifs et pédagogiques ; plus ils sont issus de catégories favorisées, plus le facteur distinctif est d’ordre relationnel » (pp.52-53). Enfin, on n’appréciera pas moins l’étude des difficultés que soulèvent le retour à une formation diplômante. L’auteur propose à cet égard une analyse qui approfondit et renouvèle la psychologie de l’adolescent comme les diverses problématiques qui ouvrent à des vues proprement anthropologiques.

On félicitera volontiers Monsieur Bergier de ce beau travail, qui mérite d’être poursuivi et approfondi, dans la ligne des recherches qu’il suggère.

Guy AVANZINI

 

Pierre CIEUTAT et Sylvain CONNAC
Coopération et évaluation. Pour ne décourager aucun élève.

Lyon, 2021, Chronique sociale, 201p.

Qu’il le veuille ou non, le système scolaire comporte nécessairement une « évaluation », tant pour juger de sa portée que pour comparer les élèves. Mais, précisément, cela entraîne des risques en exposant certains à une attitude auto dépréciative comme d’autres à une vanité naïve. Plusieurs sont découragés face au classement qui les expose à une image détériorante d’eux-mêmes et au risque d’aggraver une évolution que l’on voudrait précisément éviter.

C’est pour prévenir ce danger et ces dégâts qu’un groupe de 40 praticiens et chercheurs de la direction diocésaines de l’Enseignement Catholique de Mende se sont efforcés d’inventer de nouvelles manières de procéder. Aussi, Messieurs Cieutat et Connac ont entrepris une recherche-action partant de l’hypothèse selon laquelle l’adoption de démarches coopératives pourrait prévenir une comparaison infériorisante. Ce volume expose donc, et de manière précise et détaillée, ce que chacun d’eux a inventé pour sa propre classe en substituant la coopération à la comparaison.

Il n’est évidemment pas possible d’exposer ici toutes ces démarches, bien qu’il soit légitime de les féliciter de leur inventivité. On regrettera seulement que l’élaboration théorique soit un peu rapide, sans qu’on puisse vraiment le leur reprocher, dans la mesure où leur objectif est de préconiser des pratiques.

On signalera aussi que, malgré leur bonne volonté, cette entreprise se heurte à un obstacle sur lequel on a malheureusement peu de prise. L’usage scolaire de la comparaison, du classement et de l’évaluation négative est, en effet, l’expression scolaire d’une démarche beaucoup plus générale. C’est toute la société qui est marquée par l’influence du darwinisme et de la sélection. L’École prolonge à sa manière ce que la société induit. Un système d’évaluation correspond à une vision d’ordre proprement politique. En ce sens, pour légitime qu’elle soit, la pratique d’une évaluation détériorante est difficile à éviter. Il s’agit bien de la combattre mais sans ignorer l’obstacle considérable auquel elle se heurte.

Guy Avanzini